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Devant les maires de France, pas contents mais c’est un grand classique, Emmanuel Macron semble avoir choisi et assumé un État déconcentré plus que décentralisé. Dont acte. Pouvons-nous lui suggérer d’aller jusqu’au bout de sa logique ?
Les discours de fin de congrès de l’Association des maires de France tenaient du grand classique : une description apocalyptique de la bureaucratie à laquelle étaient confrontés des maires volontaires, mais impuissants et découragés, un « État centralisateur », source de tous les maux et de toutes les tracasseries, des éoliennes (ce nouvel ennemi) qui nous envahissent, des finances locales « pas catastrophiques, mais on ne peut pas dire que tout va très bien » (on notera la modération du propos), des libertés locales par définition toujours en danger… Bref, rien de nouveau dans le discours des maires, mais c’est le cas depuis des décennies.
Le plus nouveau sans doute était la réponse du président de la République dans son discours de clôture. Pour la première fois depuis longtemps, le cirage de pompes n’était pas au rendez-vous. Certes, les maires sont toujours le joyau de la démocratie sans lesquels rien ne serait possible. Mais, passé les formules convenues et obligatoires, Emmanuel Macron a assumé : la déconcentration plutôt que la décentralisation, les projets nationaux auxquels les collectivités sont invitées à participer plutôt que l’initiative locale, les appels à projets plutôt que les subventions…
Si nous voulons changer de système, jusqu’au bout, il faudrait donc changer de système institutionnel
Il faut reconnaître à Emmanuel Macron d’avoir choisi (et d’avoir poursuivi le chemin tracé par Nicolas Sarkozy, avec la suppression de la taxe professionnelle, et par François Hollande, avec la pulvérisation de la DGF) : l’autonomie fiscale, les impôts locaux librement décidés par des collectivités dont c’est une bonne partie des ressources… tout ça, c’est terminé.
Peut-être ce nouveau monde aura-t-il finalement des avantages : un peu plus de justice entre collectivités ou moins de concurrence pour attirer les entreprises et/ou les habitants les plus fortunés.
Mais allons jusqu’au bout. L’Allemagne, pays décentralisé pris si souvent en exemple, est aussi un pays où les collectivités ne lèvent que très peu d’impôts locaux mais où une chambre haute représente largement les collectivités locales. Elle participe au vote du budget et donc des finances locales. Si nous voulons changer de système, jusqu’au bout, il faudrait donc changer de système institutionnel, par exemple avec un Sénat vrai représentant des collectivités. Sinon, finalement, les maires auront raison : la décentralisation aura perdu du terrain.