« C’est la complémentarité des actions qui permet un management territorial »

Laure Martin

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« C’est la complémentarité des actions qui permet un management territorial »

Denys Lamarzelle

Directeur, Denys Lamarzelle * analyse les rôles respectifs des managers et des élus. À chacun son métier, à chacun ses prérogatives. Mais il y a des zones d’échanges et de coresponsabilités qui font toute l’essence du management territorial.

* Denys Lamarzelle,
est directeur territorial et auteur de « Les cadres territoriaux », aux éditions du Papyrus.

Au sein d’une collectivité, faut-il favoriser un management à deux, entre l’élu et le cadre ?

Dans le management territorial, il y a deux parties : une partie stratégique et politique qui appartient à l’élu, et une partie davantage technico-administrative qui relève du cadre. Le management territorial n’implique pas que l’élu et le fonctionnaire soient sur les mêmes tâches. L’élu a sa mission et le cadre son métier. C’est la complémentarité de ces actions qui permet un management territorial. Ce n’est pas forcément un management conjoint. En revanche, à l’intersection, il y a une zone grise, une zone sensible où chacun est duplicable et qui est l’essence même de la collectivité territoriale. Dans cette zone, il y a cinq grandes parties : l’identification des problèmes, l’étude des solutions, la décision proprement dite, la mise en œuvre des actions et l’évaluation. Tout va dépendre du partenariat qui va s’instaurer entre l’élu et le cadre. Le mode de fonctionnement se trouve assez rapidement, et fonctionne dans 98 % des cas. Pour autant, il y a parfois des incompatibilités d’humeur et cela se répercute dans la zone grise. Mais je considère qu’on a dépassé le stade du grand méchant élu et de la concurrence. Aujourd’hui, chacun a compris qu’il était nécessaire que l’on soit responsable dans nos actions et co-acteurs, chacun dans sa phase respective.

Quel rôle de manager l’élu doit-il endosser et quelle est sa légitimité par rapport au cadre ?

Selon moi, il ne faut pas mélanger les genres. Par exemple, le management des RH ne relève pas du rôle de l’élu. En revanche, le management stratégique, si. Cependant, il y a un domaine sensible qui peut être source de tensions et conflits au sein de la zone grise : le recrutement.

Ce n’est pas forcément un management conjoint, mais il y a une zone grise à l’intersection, une zone sensible où chacun est duplicable.

En théorie, au sein des collectivités territoriales, l’employeur public est le maire ou le président. Mais pour la gestion des moyens, il donne délégation au directeur général qui a donc en principe la main sur le recrutement. Pour autant, un certain nombre d’élus, adjoints notamment, souhaitent avoir leur mot à dire sur les recrutements, voire désirent eux-mêmes embaucher et privilégier l’emploi local. À compétences égales, le DG ne va généralement pas s’y opposer, notamment pour des postes de catégorie C. C’est plus compliqué pour des postes de catégories A ou B. Mais le DG sait bien faire. Il ne s’enferme pas dans une décision à une ou deux personnes et s’en remet à un comité de recrutement.

Le cadre doit-il chapeauter l’élu et l’aider à trouver sa place de manager au sein de l’équipe ?

Il est clair que le DG ou l’encadrement supérieur ont un rôle à jouer pour aider les élus à s’impliquer et à définir les objectifs stratégiques et opérationnels de la collectivité car, très souvent, dans la mise en œuvre des politiques publiques, il y a une phase conceptuelle et il n’est pas donné à tout le monde de la maîtriser. Les élus vont donc être en demande tacite. Le DG, sous la commande du maire, doit donc faciliter la déclinaison du projet tout en respectant la légitimité de l’élu. Par exemple, face à un problème donné, il ne peut pas se contenter de ne proposer qu’une seule solution à l’élu. Il doit lui en suggérer plusieurs afin que l’élu décide en fonction de ses propres critères. Par ailleurs, je considère que l’élu n’a pas de rôle à trouver au sein de l’équipe managériale. Bien entendu, il peut avoir besoin de rencontrer des agents de terrain mais cela doit demeurer ponctuel. Il ne doit pas faire partie du management d’équipe, c’est une erreur. Cela risque, sinon, d’entraîner des dérives.

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