Manager (businessman, coach, leadership) plan to increase company performance.
© Jakub Jirsák
En GRH, le coaching semble s’imposer assez naturellement et de manière presque incontournable désormais. Le secteur marchand a été le premier « consommateur » de ce type de démarche. Cependant, la sphère publique reconnaît depuis une dizaine d’années environ le bilan positif et les résultats intéressants de la démarche.
Définissons tout d’abord, brièvement mais clairement, ce qu’est le coaching. Si aujourd’hui, hélas, de nombreuses activités empruntent le terme de coaching ou de coach, un peu à tort et à travers parfois, il s’agit plus d’une opération de marketing pur que d’une véritable approche professionnelle cadrée et normée. Et pour cause. À l’heure actuelle le métier de coach n’est pas référencé en tant que tel et il n’existe pas de garde-fous permettant de faire le tri entre le « bon » et le « mauvais » coach, entre le coaching improvisé et le coaching professionnel. La profession tente cependant d’y remédier en imposant notamment une formation minimum obligatoire de niveau I et une expérience significative et représentative pour prétendre à une reconnaissance au sein des associations professionnelles (voir aussi l'interview de Laurent Batonnier, Cofondateur de l'École de coaching de Paris).
Pourquoi recourir au coaching dans la Territoriale
Par définition, le coaching est une démarche auto-apprenante qui offre la possibilité d’atteindre un objectif ou/et d’améliorer ses performances personnelles grâce au développement de ses ressources. Le coach recherche l’autonomisation de son client et favorise sa responsabilité. Le coaching n’est pas comparable à de la formation, ni à du conseil, ni à du tutorat, ni à du mentorat. C’est au final un outil supplémentaire à disposition des politiques RH.
Le coach est le professionnel qui va justement offrir les moyens de faire progresser le cheminement intellectuel.
Dans un contexte de « vaches maigres » où restriction budgétaire et raréfaction des ressources sont les maîtres mots, les collectivités doivent imaginer d’autres voies et inventer de nouvelles façons de fonctionner. L’intervention d'un coach apparaît alors très pertinente pour aider les organisations à mener des projets complexes et stratégiques.
Deux cadres d’interventions
Le cadre d’intervention du coach peut schématiquement se concevoir de deux manières. La première consisterait à aider la « gouvernance » territoriale à mieux définir son projet politique et à bâtir les nouvelles politiques publiques de demain, dans le respect des obligations légales, le souci de l’intérêt général, l’optimisation des coûts et la recherche d’un service irréprochable. C’est bien la longueur et la complexité de cette équation qui nécessitent un vrai travail de réflexion et une prise de recul salutaire avant de se lancer dans une dynamique de long terme. Le coach est le professionnel qui, justement, va offrir les moyens de faire progresser le cheminement intellectuel. Sans intervenir sur le fond, ni conseiller – et encore moins participer en qualité d’expert – il joue le rôle du « bon » perturbateur qui fait « accoucher » la volonté politique.
Le coach intervient alors pour accompagner des cadres et leur redonner les moyens de s’adapter.
La deuxième manière reposerait plus sur le plan de l’accompagnement humain. Dans un contexte d’évolution quasi-permanente des organisations territoriales où les réformes s’enchaînent les unes après les autres, les collectivités remettent en cause leur processus et recherchent les moyens de s’adapter aux perpétuelles mutations. D’un point de vue opérationnel, les réorganisations se multiplient, les organigrammes se déstructurent et se reconstruisent fréquemment jusqu’à faire parfois vaciller la qualité du service rendu aux usagers. Le coach intervient alors pour accompagner des cadres, et de plus en plus l’ensemble des agents, afin de répondre à leurs problématiques et de leur redonner les moyens de s’adapter.
Une plus-value démontrée
Par ailleurs, au regard des chantiers en cours, vastes, prolifiques, (surréalistes ?), la pression exercée sur l’agent territorial pèse parfois trop lourdement. Le surmenage et le stress opèrent et le coach peut justement intervenir ; une mission qui répondrait d’ailleurs pleinement aux obligations imposées aux employeurs publics visant à garantir la sécurité des agents vis-à-vis des risques psychosociaux (RPS). Selon l’accord-cadre signé le 22 octobre 2013 par huit organisations syndicales et l’ensemble des employeurs de la fonction publique (FPE, FPT, FPH) relatif à la prévention des risques psychosociaux (RPS) dans la fonction publique.
La plus-value d’un coach au sein des collectivités territoriales semble démontrée et justifiée. La dimension financière reste un aléa de poids cependant. Les collectivités importantes, dont le budget plus « confortable » offre plus de marges pour intégrer cette dépense, ont un réel avantage. Mais toutes les collectivités sont soumises aux mêmes tensions et sont confrontées aux mêmes difficultés ; la nécessité de faire intervenir un coach ne serait donc pas conditionnée à un niveau de strate démographique minimum.
Coach interne ou coach externe ?
Le choix est presque cornélien, tant chacune de ces hypothèses offre de multiples avantages mais aussi certains inconvénients. Prenons quelques minutes pour analyser objectivement les deux formes d’intervention.
Première hypothèse, le coach professionnel serait recruté sous la forme d’un contrat de droit public (fonctionnaire ou contractuel). Cette création de poste nécessiterait de bien définir au préalable son rôle et ses missions, son service d’affectation et son lien hiérarchique d’un point de vue administratif. Bien que depuis quelques années un cycle de formation de qualité par le biais du CNFPT soit proposé, le métier de coach au sein de la Territoriale reste marginal. La plupart du temps, ce sont des agents qui choisissent une reconversion mais le niveau de qualification en termes de compétences professionnelles peut représenter une limite.
Par ailleurs, le recrutement au sein même de la collectivité semble s’opposer au Code de déontologie du coaching, et plus précisément aux termes définis dans le titre I, vis-à-vis des devoirs du coach ((Art. 1-4 - Respect des personnes : « Conscient de sa position, le coach s’interdit d’exercer tout abus d’influence. » Art. 1-6 - Refus de prise en charge : « Le coach peut refuser une prise en charge de coaching pour des raisons propres à l’organisation, au demandeur ou à lui-même. Il indique dans ce cas un de ses confrères. »)). Comment un agent, nouvellement nommé coach interne, pourrait-il intervenir auprès de ses collègues sans faire abstraction, même consciente, de ses liens plus ou moins amicaux ? Le travail du coach serait potentiellement altéré ; la force et la puissance d’un coaching dépendent fondamentalement de la posture du coach et de son regard neutre et objectif.
Comme tout marché public, le plus important consiste à bien analyser les prestations, à bien cerner la qualité technique des intervenants.
Deuxième hypothèse, la collectivité ferait appel à un prestataire extérieur après avoir défini précisément son besoin et lancé sa consultation conformément au cadre prescrit par la Code des marchés publics. Après le long parcours administratif et juridique et la nécessaire audition des candidats présélectionnés, la collectivité retiendrait le titulaire du marché pour une durée de trois ans maximum. Comme tout marché public, même encadré par le plus précis et le plus complet des dossiers de consultation, le plus important consiste à bien analyser les prestations, à bien cerner la qualité technique des intervenants et à mesurer le coût réel du marché. Les services compétents sont contraints d’étudier en détail les propositions, qui, comme toutes les prestations intellectuelles, sont tout de même plus difficiles à évaluer.
Question de volume
L’objectif principal recherché par l’exécutif doit présider au choix retenu entre ces deux formules. Un certain nombre d’interrogations, certes élémentaires, permettent de mieux appréhender les enjeux d’un tel projet et de définir la méthode. Le volume de coaching annuel est-il connu au préalable (5, 10, 100) ? La nature des coachings prévue est-elle identifiée (en individuel, en collectif, de médiation) ? Quel service ou quelle direction piloteront le suivi et de quelles manières seront évaluées les prestations ? Quel est enfin le budget consacré à ce type de démarche et quels en sont les effets et les résultats attendus ?
Le coach interne, salarié de la collectivité, titulaire d’un poste en collectivité, peut s’imposer assez naturellement. D’une part, l’expérience et la connaissance avérée de la fonction publique territoriale du cadre représentent un atout, au-delà de son expertise et de son savoir-faire en coaching. Si la compréhension des métiers de la Territoriale, de son fonctionnement et de ses rouages n’est pas des prérequis indispensables pour le travail du coach, ils n’en sont pas moins des avantages. Le coach, fonctionnaire territorial, peut plus rapidement appréhender les obstacles et les freins liés à un poste ou à une organisation et affiner en conséquence son approche.
À quel coût ?
D’autre part, le budget prévisionnel pour le recrutement d’un agent public en qualité de coach interne serait inférieur au coût global d’une prestation de services au sein de la collectivité sous la forme d’un contrat pour le même volume de travail. De plus, le coût d’un coach interne, salarié de la collectivité, peut être évolutif et pourquoi pas revu à la baisse en considérant qu’un temps partiel suffit pour absorber l’activité, au moins dans un premier temps. Ce coût reste forfaitaire et pratiquement fixe en comparaison d’une prestation dans le cadre d’un marché dont le coût est généralement calculé à la séance ou par coaching.
Le ou les nouveaux coaches sélectionnés pourraient d’ailleurs constituer un embryon de service.
Recruter un coach au sein de la structure offre ainsi quelques intérêts, notamment pour les collectivités qui souhaitent se lancer dans la démarche. À moindre coût, il s’agirait de « tester » les services d’un coach et d’en constater les bénéfices sur le moyen terme avant d’imaginer un déploiement de plus grande envergure. Le ou les nouveaux coaches sélectionnés pourraient d’ailleurs constituer un embryon de service et réfléchir également à une structuration de long terme et à une nouvelle offre de services auprès des élus et des directions.
Une solution hybride alléchante et fructueuse ?
Une « troisième » voie est certainement possible. Entre le coach interne et le coach externe en prestation de services sous contrat, une hypothèse hybride est envisageable. Elle concilierait à la fois l’expertise et la culture ou l’esprit de la « maison » avec l’expérience et un savoir-faire extérieur à capitaliser. Cette organisation dite mixte présenterait aussi une opportunité intéressante pour les coaches eux-mêmes. Les échanges d’expériences, la mise en commune d’outils et de méthodes et leurs enrichissements, la participation aux différents réseaux, forcément diversifiés, offriraient un cadre de travail fructueux et dynamique et à forte valeur ajoutée pour les agents de la collectivité.
Enfin, en ce qui concerne les coachings d’équipes, l’intervention de coaches en duo est souvent sollicitée. En l’espèce, l’association d’un coach interne avec un coach externe est pertinente pour profiter du double regard complémentaire. Cette hypothèse conviendrait cependant mieux à une collectivité déjà initiée et engagée dans le coaching au regard du budget minimum nécessaire pour fonctionner.
Dans tous les cas, l’exigence qu’une qualité professionnelle de la part du coach demeure la clé de la réussite.
Les collectivités territoriales qui se sont déjà lancées dans la mise en œuvre de coachings ne sont pas unanimes sur le sujet. Toutes les variantes existent et on retrouve alors naturellement autant de coaches internes que de prestations externalisées. Dans tous les cas, l’exigence qu’une qualité professionnelle de la part du coach demeure la clé de la réussite du projet dans le cadre d’une politique RH au sein de la collectivité. Cette garantie de compétences et de professionnalisme passe inévitablement par le choix d’un coach certifié et diplômé au plus haut niveau (Bac + 5). Le choix du coach interne ou externe n’est au final qu’un choix stratégique en fonction des orientations et des volontés.