Contrat de finances : « On rapproche la gestion publique locale des règles des entreprises »

Coralie Donas

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La seule limite des dépenses de fonctionnement ne suffit sans doute pas. Comme ailleurs en Europe, contractualiser sur la base de la performance des politiques publique pourrait être une piste plus efficace, explique l’universitaire Marie-Christine Steckel-Assouère.

Vous avez été auditionnée par le Ceser Auvergne Rhône-Alpes pour donner des pistes concernant la contractualisation ?

Les différentes collectivités critiquent plus les modalités de la contractualisation que la contractualisation en elle-même. Le président de la région Auvergne Rhône-Alpes avait demandé la consultation du Ceser régional pour qu’il réfléchisse à la façon d’améliorer la contractualisation. La région propose par exemple que les contrats tiennent compte des réalités locales, souhaite ajuster les moyens, les objectifs, promouvoir la notion de contrat et voudrait être partie prenante des négociations. Elle revendique que ce ne soit pas seulement les collectivités qui s’engagent à être de bonnes élèves, mais que l’État s’engage aussi, en donnant plus de dotations par exemple.

« Il pourrait être intéressant d’aller au-delà de la règle financière pour viser, comme à l’étranger, un pacte de stabilité »

Quelles sont les pistes à explorer de manière plus générale ?

L’Assemblée des communautés de France, ADCF, demande depuis longtemps d’avoir une vision globale, de pouvoir parler de contractualisation au sens large et pas que financière. Lors de sa trentième convention en octobre dernier, l’association a annoncé qu’elle allait travailler sur l’idée de contrat global. Le futur projet de loi 3D, décentralisation, différenciation et déconcentration, sera l’opportunité de travailler sur une contractualisation plus globale. L’idée est de mettre dans la même enveloppe les contrats de plan, les pactes territoriaux, etc. Il pourrait être intéressant d’aller au-delà de la règle financière, avec un objectif de limitation, pour viser, comme à l’étranger, un pacte de stabilité. En échange du plafonnement, les collectivités veulent s’assurer de dotations stables, connaître à l’avance les recettes dont elles pourront bénéficier.

« En Italie, les dotations sont liées au niveau essentiel de prestations, l’évaluation des services publics est obligatoire »

Quels sont les exemples à l’étranger dont la future contractualisation pourrait s’inspirer ?

En Italie, les dotations sont liées au niveau essentiel de prestations, l’évaluation des services publics est obligatoire et permet d’établir le coût de chaque service public. Il y a aussi une politique de transparence des informations, elles sont diffusées sur internet pour permettre aux citoyens d’être informés. Cela oblige les élus locaux à mieux gérer, car il y a des standards, il est possible de faire des comparaisons, facile de voir que dans telle région, tel service coûte plus cher. Cela met les contribuables, les usagers, en position d’arbitrage.

En Espagne, la loi organique prévoit la coresponsabilité avec l’État, pour les communautés autonomes, à la fois en termes de recettes et de dépenses publiques. Les compensations financières se font dans une logique de concertation avec les collectivités territoriales concernées. Comparaison n’est pas raison, mais l’Italie et l’Espagne, les pays les plus proches de la France en termes d’organisation, ont accordé beaucoup d’autonomies aux collectivités, aux régions notamment.

La France a voulu mettre cet échelon en avant avec la création des grandes régions, ainsi que des intercommunalités.

Quelles marges de manœuvre ont les élus pour réaliser de nouvelles économies ?

La contractualisation impose 1,2 % seulement de hausse des dépenses de fonctionnement. La loi du 6 août 2019 qui supprime les régimes dérogatoires à la durée légale du travail de 1 607 heures par an va permettre de faire des économies. De même, la loi va largement faciliter le recours aux contractuels, ce qui permettra aux collectivités de gérer plus facilement la masse de personnel.

Ces nouvelles règles de gestion publique devraient aider les élus. La loi rapproche de plus en plus la gestion publique locale des règles des entreprises.

Marie-Christine Steckel-Assouère est maître de conférences HDR à l’université de Limoges, vice-présidente du conseil scientifique et responsable de la commission aménagement du territoire et mobilité du Groupement de recherche sur l’administration locale en Europe (Grale), Université Paris 1.

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