Je ne sais pas quelle est la situation des commerces culturels dans vos communes, mais dans la mienne, ça va moyennement bien. Certes, nous avons la chance d'avoir en centre-ville une librairie de qualité, dirigée par le patron du Syndicat de la Librairie Française en personne. D'autres libraires, de tailles plus modeste mais spécialisés sur un créneau ciblé (BD, manga, religion...) ne s'en sortent pas trop mal même si leur activité reste extrêmement fragile. En matière de lecture, c'est toujours perfectible, mais je crois que nous ne sommes vraiment pas à plaindre par rapport à d'autres communes plus petite ou de taille similaire. Et quel est le point commun de tous ces commerces culturels qui tiennent bon ? L'indépendance. Car du côté des chaînes et franchises, la situation n'est pas glorieuse. En l'espace de quelques semaines, ce ne sont pas moins de trois enseignes culturelles qui ont ou vont fermer leur porte dans cette commune d'à peine plus de 100 000 habitants ! Exit le disquaire Harmonia Mundi, exit les magasins jeux vidéo Game, et sans doute prochainement exit la grande surface Virgin... Et pour noircir un peu plus le tableau, comme le souligne Sébastien Bailly sur le pure player local Grand Rouen, "La Fnac, en centre ville de Rouen, vend des moules à tarte et des robots ménagers".
Dans ce contexte, il y a de quoi se réjouir d'avoir encore dans nos rues quelques libraires et quelques disquaires (oui, ça existe encore !) indépendants. Car si un tel enchaînement de fermetures dans un bassin de vie de 500 000 habitants est déjà une catastrophe, dans une commune ne disposant pas ou plus d'un tel réseau c'est un véritable carnage ! Catastrophe humaine, au premier chef, car des dizaines de salariés vont se retrouver sur le carreau (et dans l'agglomération rouennaise, nous n'avions vraiment pas besoin de ça...). Et catastrophe culturelle, bien sûr. Où retrouverons-nous la sélection pointue et les conseils personnalisés d'Harmonia Mundi ? Et la diversité mainstream des produits vendus chez Virgin ? Au milieu des moules à tarte et des robots ménagers de la Fnac ?
On peut se réjouir, aussi, de la présence d'un réseau de bibliothèques qui doit être enfin plus que jamais conforté dans son rôle de médiateur et de prescripteur. Dans ce contexte national de fermetures d'enseignes, il serait bon que les élus de tous bords et de communes de toutes tailles se souviennent (ou découvrent, il n'est jamais trop tard pour bien faire !) qu'avec un peu de volonté politique et des professionnels qualifiés ils ont le pouvoir d'empêcher la transformation de leur territoire en désert culturel.