opposition
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Je l’ai déjà dit dans ces lignes, je suis convaincu que le grand échec de la décentralisation, c’est celui de la démocratie locale. Dans trop de collectivités, les têtes de l’exécutif local peuvent impunément se comporter en chefs tout-puissants, faute de contre-pouvoir efficace. Juridiquement, ça fait un bail que le contrôle de légalité ne remplit plus son rôle. Les CRC continuent de faire un travail essentiel, mais bien souvent le lien avec la justice rend la menace de sanction bien théorique.
Un exemple et un contre-exemple
Politiquement, l’opposition n’a pas beaucoup de moyens pour travailler. Ses élus ne disposent bien souvent ni du temps, ni de l’expertise nécessaires pour analyser sérieusement les délibérations qui lui sont proposées. C’est d’autant plus flagrant que la pratique massive du « cumul horizontal » (entendons par là celui qui consiste pour un maire à être président d’agglo, du conseil d’administration de l’hôpital, d’une demi-douzaine de syndicats intercommunaux, de l’office du tourisme, de la régie des transports, et j’en oublie…) aboutit aussi à une multiplication des moyens humains et des moyens de pression politique.
Ce qui s’est passé récemment à Bordeaux est à la fois l’exemple et le contre-exemple de ces constats. Pour résumer, et on demande ici à Alain Juppé de ne pas se sentir une cible, ce dernier a été récemment et à plusieurs reprises en difficulté avec son opposition municipale et a dû adapter son action à ces démêlés.
L’opposition a ici pleinement joué son rôle : elle a travaillé et réussi à mettre dans l’embarras la majorité municipale à plusieurs reprises.
On citera le jugement du Conseil d’État, invalidant le PPP d’un nouveau stade de la ville pour irrégularité et un récent conseil municipal houleux où une vive polémique a eu lieu sur la réalité des ratios d’endettement présentés aux conseillers municipaux.
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Quand l'opposition joue son rôle
À chaque fois, la polémique a été vive, Alain Juppé accusant l’opposition de chercher le coup politique en le diffamant, cette dernière accusant le premier de sciemment mentir sur les chiffres. Peu importe, dans ma démonstration, qui a tort ou raison. Mais on peut mettre le doigt sur une chose. L’opposition a ici pleinement joué son rôle : elle a travaillé, trouvé les moyens humains et en temps pour analyser les chiffres toujours cryptiques des budgets municipaux, et réussi à mettre dans l’embarras la majorité municipale à plusieurs reprises.
Continuons à affirmer qu’il faut rééquilibrer les pouvoirs locaux en renforçant les contre-pouvoirs, qu’ils soient politiques, judiciaires ou administratifs.
On pourrait en tirer la preuve que c’est une question de volonté et que toute opposition est en mesure de faire de même, pour peu qu’elle y consacre l’énergie nécessaire. On préférera ici considérer qu’on a à faire à une situation particulière, où de nombreuses conditions sont réunies, qui le sont rarement ailleurs. Et continuer à affirmer qu’il faut rééquilibrer les pouvoirs locaux en renforçant les contre-pouvoirs, qu’ils soient politiques, judiciaires ou administratifs. Puisque la démocratie locale est, trop souvent, considérée comme optionnelle par bien des élus, faisons-en davantage une contrainte.