528-democratie-participative-AdobeStock_175319165
© nutthaseth - Adobestock
Autant la démocratie participative est plébiscitée, autant les outils mis en œuvre pèchent par leur inefficacité ou par leur manque de pérennité. D’où la nécessité de franchir une étape. Qui passe sans doute par les budgets participatifs.
À la fin des années 1990, sentant grandir la désaffection des citoyens à l’égard des institutions politiques, j’avais écrit un ouvrage promouvant la démocratie participative « Stratégie et démocratie territoriale », dont Claudette Brunet-Lechenault, rapporteure du rapport du CES en 2000 « La décentralisation et le citoyen », en avait réalisé la postface. Il n’est pas passé inaperçu dans la mouvance de la loi « Démocratie de proximité », certains passages ayant régulièrement servi de sujet de concours de la fonction publique. Par ailleurs, il fut présenté sur le site d’une candidate à la présidentielle particulièrement engagée en matière de démocratie participative.
Lire aussi : Démocratie participative : éloge de la sincérité
Peut-on être satisfait de la réponse ?
On me trouvait à l’époque plutôt léger et utopiste de promouvoir une telle démarche, jugée pas très sérieuse et qui relevait plus du gadget et du « tracassin innovateur des collectivités locales » que de la « bonne gestion publique » ! Aujourd’hui, les faits sont là.
Jamais la demande dans ce domaine n’a été aussi forte, entre les citoyens squattant les ronds-points et les élus. Et parmi ceux-ci, si certains cherchent à améliorer les outils mis en place (qui ont la fâcheuse tendance à s’essouffler), d’autres élus réfractaires de la première heure doivent désormais s’adapter rapidement à la nouvelle donne. Plus de quinze années après la loi de février 2002, peut-on être satisfait de la réponse que l’on a apportée à la demande citoyenne de démocratie participative ?
Demander à des élus de concéder une (petite) partie de leur pouvoir à des « citoyens ordinaires » ne coule jamais de source
L’effet cerise sur le gâteau
Les évaluations menées par les observateurs en la matière sont plutôt mitigées. Il est vrai que demander à des élus de concéder une (petite) partie de leur pouvoir à des « citoyens ordinaires » ne coule pas de source. Même si les outils sont souvent des commissions, instances qui restent finalement consultatives… Dans la réalité des faits, nombre de structures participatives ont du mal à perdurer, les principaux reproches qui leur sont faits étant : l’effet cerise sur le gâteau, des débats limités à l’échelle locale, la recherche du consensus pour éviter les conflits, le risque de retrouver les TLM (toujours les mêmes), l’auto-exclusion de certains publics (jeunes, étrangers…), les positions trop radicales de certains, le sentiment de servir d’alibi et d’instrumentalisation, la parole monopolisée par ceux qui savent parler en public, les délais trop longs, l’investissement personnel sans retour visible. Sans parler de la complexité des relations élus/citoyens/administration, l’irruption du citoyen dans le système décisionnel territorial étant parfois vécue comme une véritable contre-expertise citoyenne…
Les décideurs politiques qui se sont engagés dans cette démarche ont tout intérêt à accepter les propositions issues des débats citoyens…
Aujourd’hui, on ne peut que constater (et c’est peu de le dire !) que les attentes sont de plus en plus fortes pour mettre en place une démocratie participative pertinente, constructive et réellement adaptée à un dialogue citoyen.
Lire aussi : Les civic tech veulent rendre concrète la participation citoyenne
Un budget participatif, un vrai
L’outil qui semble particulièrement correspondre à cette volonté, notamment parce qu’il a une obligation de résultat, c’est le budget participatif. Il s’agit de donner une responsabilité budgétaire aux habitants pour financer des aménagements (voirie, éclairage public, espaces verts…) ou des animations (fêtes de quartier, festivals…). Ces budgets peuvent être dédiés à des conseils de quartier, mais aussi à des lycées, des collèges, des commissions, des conseils de jeunes…
Il est grand temps, « chemin faisant », de faire réellement participer le citoyen à la gouvernance locale
Dans certains cas, et si la volonté politique est là, des projets spécifiques d’une certaine ampleur peuvent être « décidés » dans le cadre de l’engagement d’un budget participatif. L’intérêt est le suivant : même si la structure support reste légalement consultative, les décideurs politiques qui se sont engagés dans cette démarche ont tout intérêt à accepter les propositions issues des débats citoyens… au risque de perdre sérieusement en crédibilité. De quoi aurait l’air une municipalité qui affirmerait s’engager sur un budget participatif et qui refuserait ensuite les « décisions » citoyennes ?
Aujourd’hui la démocratie participative n’est plus une utopie, et il est grand temps, « chemin faisant », de faire réellement participer le citoyen à la gouvernance locale. Véritable délégation donnée par les responsables politiques, les budgets participatifs peuvent largement y contribuer.
Du même auteur : Relations avec les élus : adoptez un organigramme en pizza