Dossier Écoles des cadres : une nouvelle ambition pour la fonction managériale

Coralie Charles

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Écoles des cadres : une nouvelle ambition pour la fonction managériale

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© Adobestock

Ça bougeait dans le management, ça s’accélère. De plus en plus, les collectivités, de toutes tailles, entreprennent de renforcer tous les échelons de leur management. L’outil, des écoles des cadres chargées d’infuser les organisations avec de nouvelles pratiques. Tout le monde s’y met.

Écoles, campus, université… du management territorial… quelle que soit l’appellation retenue, il s’agit pour les collectivités de mettre à disposition de leurs managers des dispositifs internes d’accompagnement qui leur permettent de développer de nouvelles compétences dans un contexte de fortes mutations. En effet, leur rôle a fortement évolué ces dernières années, à l’aune des bouleversements qu’ont connu les institutions territoriales et plus globalement les organisations de travail. Le métier de manager est désormais reconnu dans sa spécificité et son exigence, tandis que les écueils du passé (promotion à l’ancienneté, survalorisation de l’expertise technique…) tendent à s’atténuer.

La professionnalisation de l’encadrement de proximité reste un défi majeur à relever pour la plupart des collectivités

Par ailleurs, la récente crise sanitaire va probablement accélérer la transition managériale qui se profilait, tant dans les modes de fonctionnement et les pratiques que dans le rapport au travail. Donner du sens, augmenter la résilience individuelle et collective, renforcer l’engagement et la performance, s’interroger sur les valeurs communes sont autant d’enjeux devenus clés. La fonction managériale est devenue un maillon essentiel et incontournable pour relever les défis actuels dans le secteur public comme privé. Il s’agit donc d’accompagner et d’outiller les managers pour qu’ils soient à la fois acteurs et ambassadeurs des dynamiques de changement, et qu’ils contribuent ainsi à la transformation des organisations.

Quels managers sont visés ?

Les principaux bénéficiaires sont les managers ayant une fonction d’encadrement, avec une tendance cependant à élargir la cible aux managers dits fonctionnels ou matriciels (chefs de projets, chargés de missions, référents RH…). La région des Pays de la Loire propose une alternative intéressante à suivre avec son académie des métiers, ouverte à d’autres communautés que les managers en vue de faire grandir les talents. D’ailleurs, même si tous les cadres sont potentiellement visés, l’accent est mis sur les nouveaux managers et les évolutions professionnelles, ou encore sur la capacité à innover, avec l’objectif d’éveiller et de valoriser les potentiels.

Exit les seuls plans de formation comportant un volet management ! Il s’agit désormais de mettre en place des structures ou dispositifs dédiés

Cependant, les principaux utilisateurs restent les managers dits stratégiques et intermédiaires. Malgré la volonté affichée d’intégrer les managers de proximité, la difficulté à les toucher reste récurrente. Cet échelon est en effet un relais essentiel au plus près des équipes, dont le rôle clé a été mis en lumière à l’aune de la crise sanitaire, mais qui reste encore trop souvent cantonné dans un rôle d’exécution. Leur professionnalisation demeure ainsi un défi majeur à relever pour la plupart des collectivités, au risque de maintenir des écarts trop importants avec les autres niveaux de managers et de freiner le déploiement d’une culture commune. De même, il convient de veiller à l’implication du top management dans les dispositifs proposés, pour éviter une autre forme de césure au sein de la communauté managériale, susceptible de nuire à sa cohésion.

Des offres à géométrie variable

Exit les seuls plans de formation comportant un volet management ! Il s’agit désormais de mettre en place des structures ou dispositifs dédiés, visant plus largement à accompagner les managers, dans une double logique de formation continue et d’expérimentation de nouvelles pratiques. Cela prend la forme de parcours, cursus ou itinéraires de formation d’environ quatre à douze jours, pour des promotions de dix à quinze managers. Obligatoires et/ou à la carte, le débat n’est pas tranché et l’on retrouve souvent les deux formats. L’objectif est de former en quelques années l’ensemble des managers sur un tronc commun, tout en s’appuyant sur le volontariat pour expérimenter et diffuser de nouvelles pratiques.

Les démarches initiées par de très grandes collectivités se développent dans toutes les strates

Dans certains dispositifs, les élèves doivent également réaliser un projet déterminé qui sera évalué en fin de parcours. Les offres de formation contiennent ainsi un socle de fondamentaux (RH, finances, rôle et posture managériale), auquel s’ajoutent des modules à la carte portant sur des méthodes innovantes et collaboratives (mode projet, intelligence collective, design de service…), ainsi que sur le développement personnel et l’apprentissage collectif (soft skills, coaching individuel ou d’équipe, codéveloppement…). En parallèle, des séminaires et conférences thématiques (ex. : discrimination, égalité, entreprise libérée, intelligence émotionnelle…), des ateliers d’analyse de pratiques ou encore des cafés et matinées des managers, viennent compléter l’arsenal proposé. En somme, un beau bouquet de services pour inspirer et nourrir les managers !

TÉMOIGNAGE

« Ancrer une logique de formation continue et d’échanges de pratiques »

"Le management nécessite plus que jamais de disposer de compétences spécifiques, de se former et d'être accompagné dans une boucle d’amélioration continue. L’enjeu est d’outiller les managers, et en particulier les cadres de proximité. Les politiques de recrutement basées sur leur seule expertise technique, avérée et a priori rassurante, les mettent cependant souvent en difficulté. A cet effet, il est primordial de renforcer leur connaissance de leur environnement professionnel (rh, finances, …), de leurs postures et leviers, tout en favorisant l’échange de pratiques. Ce sont les deux grands axes de notre programmation, auxquels s’ajoutent depuis peu les questions du management à distance et la lutte contre la fracture numérique. Par ailleurs, nous souhaitons privilégier le travail entre pairs et la logique de réseaux internes apprenants. D’où le choix de nous appuyer sur un pool de 15 formateurs internes, qui animent des ateliers et transmettent leurs savoirs. Ce système favorise à la fois la solidarité et la transversalité. Prochaine étape : proposer des modules de formation communs aux managers des communes de la métropole. »

Marie Blondel, DGA pôle management des ressources, ville de Rouen

Chaque collectivité a son modèle

Si l’on assiste à une forme de standardisation des contenus et formats proposés, les dispositifs reposent néanmoins sur des modèles spécifiques à chaque collectivité. Ils varient selon la taille et l’organisation interne, l’identité et la culture managériale ou encore le niveau de maturité quant aux approches innovantes. Si ces démarches semblent avoir été initiées par de très grandes collectivités, elles tendent aujourd’hui à se développer dans toutes les strates. Dans le tout récent baromètre sur les pratiques managériales (dont les résultats seront publiés dans le prochain numéro de La Lettre du cadre territorial), 44,9 % des répondants indiquent que leurs collectivités ont mis en place un dispositif interne de type « école de cadres » et 58,7 % l’estiment pertinent quant aux besoins exprimés.

La récente crise sanitaire va probablement accélérer la transition managériale qui se profilait

Ainsi, aux côtés de collectivités pionnières telles que le conseil départemental du Val-d’Oise avec son « école du management de l’innovation » ou encore la ville et métropole de Lyon avec son école devenue « campus des managers », de nouvelles structures ou dispositifs ont vu le jour ces cinq dernières années, tels que l’école du management de la ville de Rouen (Seine-Maritime), de la ville et l’Eurométropole de Strasbourg (Bas-Rhin), le campus des cadres de la région Ile-de-France,  le dispositif Manag’est de la région Grand Est, ou encore les « Truc » (temps de rencontres utiles entre cadres) de la ville de Caluire-et-Cuire (Rhône). Ainsi, à chacun son dispositif, avec une tendance à affirmer et valoriser l’identité de la collectivité au travers de l’outil déployé : un bon moyen pour dynamiser la marque employeur et attirer de nouveaux talents !

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