dossier presidentielles_partie1
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Qu’attendent les cadres territoriaux du futur président de la République ? Révolution fiscale, moratoire ou simples ajustements sur les réformes lancées, valorisation des métiers plus que des filières, coordination clarifiée de la chaîne région-métropole-intercos, assouplissement du statut, etc. La liste est longue des débats à ouvrir.
Le ras-le-bol des territoriaux
Lorsqu’on les invite à dire ce qu’ils ont sur le cœur, l’impression de ras-le-bol domine. Marre de ce « fonctionnaire bashing » fondé sur des approximations. Marre d’être montrés du doigt comme des faiseurs de déficits publics. Mais c’est ainsi : descendre en flèche le fonctionnaire est un exhausteur de bonnes opinions pour le candidat aux présidentielles, la suppression de 500 000 fonctionnaires annoncée par François Fillon a fait mouche ; pourquoi s’arrêter en si bon chemin ?
« À l’évidence, la fonction publique au sens large et la Territoriale en particulier manquent d’un portage politique. »
Pis encore, quand de telles assertions sont assénées, la gauche et les tenants d’une fonction publique droite dans ses bottes regardent le bout de leurs chaussures, à l’exception de Manuel Valls et Benoît Hamon, lors des récentes primaires ou des instances représentatives des cadres territoriaux mais dont les grands médias font peu de cas. « À l’évidence, la fonction publique au sens large et la Territoriale en particulier manquent d’un portage politique », constate Isabelle Morel, directrice bien-être au travail, action sociale et dialogue social au conseil régional d’Ile-de-France. Les cadres rêvent secrètement d’une campagne de communication institutionnelle rétablissant quelques vérités, du genre : « Que serait votre quotidien sans les fonctionnaires territoriaux ? ».
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Schizophrénie
Certains élus locaux, souvent classés à droite et participant de cette démonétisation de la FPT, affichent d’ailleurs un comportement schizophrénique : le discours parisien s’adoucit dès que l’on redescend à l’échelle du territoire et des vrais enjeux de proximité. « Quand on nous demande de diminuer la voilure financière, notamment en frais de fonctionnement, et que l’on pose la question de savoir dans quels services il faut « couper », le débat change de nature, les élus se rendent compte que ce n’est pas aussi simple », peste Martine Poirot, DGS de la communauté de commune du Bassin de Pompey.
Des fonctionnaires toujours plus à droite ?
À ces constats amers s’ajoute un autre, plus troublant : les fonctionnaires eux-mêmes se droitiseraient, comme s’ils validaient le discours de François Fillon et se tiraient ainsi une balle dans le gros orteil. « C’est plus complexe que ça », assure le chercheur du Cevipof, Luc Rouban. « Les fonctionnaires, notamment les agents d’exécution, sont confrontés plus que les cadres à une difficulté croissante pour exercer leur métier. Ils veulent plus d’autorité, plus de reconnaissance ».
« Les fonctionnaires eux-mêmes se droitiseraient, comme s’ils validaient le discours de François Fillon et se tiraient ainsi une balle dans le gros orteil. »
Jean-Jacques Roux, DGS de la ville de Marignane, confirme : « Certaines catégories n’intellectualisent pas leur vote. Ils réagissent à un malaise ». Malaise dont tirent profit la droite et Marine Le Pen. Selon la dernière enquête du Cevipof, la candidate du FN, qui oscille entre 20 et 22 % des intentions de vote, arrive largement en tête des intentions de vote des fonctionnaires (18 000 fonctionnaires sondés, tout de même).
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Un désamour croissant avec la gauche qui s’expliquerait par le recul du pouvoir d’achat des fonctionnaires (gel du point d’indice) et la fragilisation de leur statut. Deux chantiers sur lesquels François Hollande a visiblement échoué… mais sur lesquels aussi droite et extrême-droite ne promettent pas des lendemains qui chantent ! Drôle d’époque…