Dans le cadre des Journées d'étude du COREPS Languedoc-Roussillon sur les résidences d'artistes dont il était question dans la Lettre d'info n° 383, il me parait intéressant de vous rendre compte de paroles d'élus locaux et de représentants d'artistes cosignataires de la charte d'accompagnement des oeuvres et des équipes artistiques professionnelles lors de la deuxième journée de cette rencontre.
L'élue d'une ville de 12 0000 h exprime son souhait d'aller vers le public le plus large possible. Plutôt que ces résidences de courte durée qui se font actuellement sur sa commune, qui conduisent à un certain saupoudrage, elle estime préférable d'aller vers des « cheminements », sur une plus longue durée. Elle souligne aussi que sans les cofinancements, rien ne se ferait.
L'élu (depuis 2008) d'une communauté de communes de 12 500 h explique se sentir « en formation permanente », entre immersion et engagement. Il regrette que le statut de l'élu produise une telle distanciation par rapport au citoyen : l'élu apparait ainsi comme « l'oiseau rare », lui-même dit se sentir parfois considéré uniquement comme un tiroir caisse... Sa communauté de communes accueille deux à trois résidences par an pour accompagner en priorité les artistes du territoire, sur trois ans. L'une des compagnies en résidence explique que le budget de la résidence (DRAC + CG + Com com) est porté par la Compagnie.
L'élue d'une commune de 5 000 habitants explique qu'elle cherche à structurer et professionnaliser correctement un lieu de musiques actuelles en état de marche, en bataillant en interne car les associations veulent utiliser la nouvelle salle comme s'il s'agissait d'une salle polyvalente. Après l'échec d'une résidence sans accueil ni professionnel, elle ne trouve pas d'argent pour faire une résidence « correcte », c'est-à-dire payer les artistes, car la commune estime que les mises à disposition de locaux (apport en industrie) et le coût du spectacle représentent déjà beaucoup pour elle.
Les représentants de la DRAC et de la Région lui répondent que pour que leurs institutions interviennent auprès d'une commune, encore faut-il qu'elles ressentent un « désir mutuel » (donc un minimum de moyens apportés par la collectivité de base).
Le représentant du Syndeac estime que la mise à disposition de locaux est évidente (cf. la Charte), qu'elle peut être indiquée mais qu'il peut être dangereux de la valoriser comme si c'était la part de la commune. Il se demande jusqu'où une collectivité devrait dire : « je ne dois pas construire cet équipement car le projet n'est pas viable » ? mais il y a des problèmes de temporalité, les choses évoluant souvent en cours de route. De même, la représentante d'un syndicat professionnel d'artistes estime que si l'on s'aperçoit que le projet prend de l'ampleur, il faudrait avoir le courage d'une décision commune de réévaluation ou bien de l'abandon du projet (coresponsabilité des acteurs de la chaine, afin d'être gagnant-gagnant).
Il est regretté que les budgets de fonctionnement des équipements culturels soient souvent mal dotés initialement (on devrait prendre exemple sur la politique d'aide aux bibliothèques : les municipalités doivent s'engager en amont à créer un budget de fonctionnement propre à la bibliothèque pour être aidées par l'Etat et le Département). En l'occurrence, concernant les petites communes, elles ne devraient construire qu'une salle en intercommunalité pour avoir ensuite les moyens de leur politique...
La représentante d'un syndicat professionnel d'artistes estime qu'il faut prendre en compte le coût réel d'une résidence, à commencer par les règles minimales existantes en terme de code du travail. Souvent existe un accord implicite... et les artistes en font plus que ce qu'ils sont payés. Il faudrait donc oublier l'idée que « la part invisible de la création » pourrait être prise en charge par l'intermittence....
La question des coproductions est abordée, et d'aucuns se tournent vers les grosses structures qui ne joueraient plus leur rôle en la matière. Pour l'administrateur du CDN, c'est un peu le serpent qui se mord la queue, car explique-t-il, leurs propres subventions stagnent. Faut-il faire moins de coproductions mais mieux produire, se demande-t-il, aller vers des sociétés en participation (SEP) ?
En terme de formation, il faudrait aller à la fois vers l'amélioration de la compétence des élus dans le domaine du spectacle vivant, et de celle des artistes dans le domaine des politiques publiques.
Quoi qu'il en soit, ce dialogue direct entre élus et représentants d'artistes fût fructueux, bien que le nombre d'élus présents à cette rencontre régionale se soit limité à trois...
François Deschamps