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L'option "communes nouvelles" procède bien souvent plus d'un choix de raison que de cœur. Plutôt que de passer à la broyeuse avec l'évolution des intercommunalités et la baisse des dotations, les "petites" communes essaient de sauver ce qu'elles peuvent en termes de services de proximité, assure Yann Landot.
Yann Landot, yann.landot @landot-avocats.net
Après avoir travaillé en cabinet d’avocats et dans une grande entreprise délégataire de services publics, Yann Landot a intégré le cabinet Landot & associés. Il intervient notamment sur les problématiques liées à l’intercommunalité, au droit des services publics locaux et au droit de l’environnement.
Pourquoi la formule « commune nouvelle » séduit-elle de plus en plus de maires, notamment dans les petites communes ?
C’est le fruit d’une longue réflexion qui aboutit à ce qu’on fasse au final le choix de la raison plutôt que celui du cœur. L’heure est au regroupement intercommunal, aux réformes territoriales, à la baisse des dotations financières de l’État, etc. Bref, le contexte est anxiogène et certains maires tentent de sauver ce qu’ils peuvent, notamment pour les services à la population (petite enfance, etc.), ce que le dispositif des communes nouvelles leur offre. Ils se disent qu’à plusieurs communes en une seule, ils seront plus forts pour faire face aux rudesses du temps. Ils agissent avec pragmatisme.
L’avocat que vous êtes est-il de plus en plus saisi par les maires sur ce thème…
Ce n’est pas encore vraiment le cœur de mon activité, mais le dispositif monte en puissance en termes de curiosité, d’envie d’en savoir plus. L’intérêt croissant des maires est lié au fait qu’ils ne veulent pas isoler leur commune. Les charges sont de plus en plus importantes, les secrétaires de mairie n’en peuvent plus. Et les maires n’ignorent pas que s’ils veulent sauver la proximité sur leur commune, ils doivent en avoir les moyens techniques et ces modalités d’action ne sont possibles que dans le cadre de regroupements de communes.
« Les maires n’ignorent pas que s’ils veulent sauver la proximité sur leur commune, ils doivent en avoir les moyens techniques. »
Le pragmatisme va-t-il jusqu’à mettre de côté les enjeux politiques sur un territoire ?
Non, notamment dans le choix du maire, les discussions resteront toujours serrées. Mais les élus savent être raisonnables. Les maires ont compris que nous avions changé de monde. Ils cèdent aussi parce qu’ils ont compris qu’ils avaient de plus en plus de mal à boucler leur budget. L’État a eu la peau des communes par épuisement. Il aurait été simple d’imposer des fusions de communes mais il n’a pas osé le faire ; il a opté pour la voie plus escarpée et lente de la pression financière et la création de communautés plus grandes, rendant nécessaire la recherche d’un autre niveau de gestion des services de proximité. Épuisés, les maires lâchent prise. Et nous arrivons au bout du processus. Certains pleureront sur cette nouvelle donne, sur la menace de perte d’identité du village. D’autres s’en réjouiront, assurant qu’il s’agit de la suite logique d’une marche en avant ainsi qu’une opportunité de redynamiser leur territoire.
Existe-t-il une recette miracle pour réussir la création de la commune nouvelle ?
Probablement pas, mais – comme en création de communautés – le dialogue entre élus (ainsi qu’avec les agents, mais aussi la population) est primordial. Il est important que ces acteurs se projettent comme dans un jeu de rôles : si demain la commune nouvelle est créée, qui gérera la proximité avec les familles ? Comment seront instruits les permis ? Quel rôle pour le maire délégué ? Comment seront décidés les travaux de voirie ? etc. Peu à peu, cet exercice conduira les élus à préfigurer le fonctionnement concret de leur commune nouvelle. Cette démarche aboutit souvent à l’élaboration d’une charte, adoptée par toutes les communes avant la création. Au final, il me semble important d’imaginer collectivement son territoire.