Franck Périnet, directeur de l'INET,
© INET_Pascal_Bastien
Les deux classes prépas Talents de l’ENA et de l’Inet sont sur les rails, à Strasbourg et Nantes. De nouveaux élèves, issus de milieux modestes, vont être formés pour occuper des postes de responsabilité dans les collectivités territoriales ou les services de l’État dans les prochaines années. Une adaptation essentielle pour ces écoles désireuses de susciter de nouvelles vocations.
Directeur de l’Inet depuis octobre 2019 après avoir connu plusieurs postes de direction au sein du département de Loire-Atlantique, Franck Périnet s’attache à diversifier les profils des candidats à l’Inet. Un sujet parlant pour celui qui fut le premier bachelier de sa famille d’artisans du bâtiment.
Où en sommes-nous concrètement des classes préparatoires « égalité des chances » conçues conjointement par l’ENA et l’Inet ?
Nous sommes bien avancés puisque les premiers candidats ont déposé leurs dossiers. Ils ont été informés de leur admissibilité le 27 mai. Suivra un entretien avec un jury pour la phase d’admission. Ces deux prépas Talents ouvriront ensuite en octobre. Elles sont destinées aux personnes issues de milieux modestes, disposant d’un Bac + 3. Nous avons répondu à l’appel à projets lancé par l’État dans la continuité de l’intervention du Président de la République, le 11 février dernier. La volonté du CNFPT, dont dépend l’Inet (Institut national des études territoriales), et de l’ENA (École nationale d’administration), est de favoriser l’émergence d’une plus grande diversité sociale et géographique chez les hauts fonctionnaires. Une ambition déjà portée par l’ouverture d’un concours externe spécial, auquel les élèves de ces prépas pourront se présenter. Quatre places leur sont destinées, s’ajoutant aux vingt-six du concours externe d’administrateurs auxquelles ils peuvent aussi prétendre.
« Les élèves bénéficieront d’un accompagnement personnalisé, avec un accès facilité à un logement du Crous, le prêt d’un ordinateur ou encore l’octroi de la bourse ‘‘allocation diversité’’ »
Présentez-nous plus en avant ces deux classes ?
La première est portée par Sciences Po Strasbourg ; elle est une extension de douze à vingt-quatre places de la classe préparatoire préexistante. La seconde, à Nantes, également de vingt-quatre places, est portée par l’Ipag (Institut de préparation à l’administration générale).
Ces deux partenariats sont fondamentaux en termes de portage pédagogique afin de garantir le caractère diplômant du cursus. Une fois sélectionnés, les candidats passeront un oral d’admission entre les 7 et 18 juin, afin d’évaluer les aptitudes, le potentiel, la motivation et le parcours. Une prérentrée est prévue fin juin, début juillet. Ils bénéficieront d’un accompagnement personnalisé, avec un accès facilité à un logement du Crous, le prêt d’un ordinateur ou encore l’octroi de la bourse « allocation diversité » dont le montant a été doublé pour passer à 4 000 euros.
Ce soutien se traduit par ailleurs par des partenariats noués avec trois associations : l’ENA 50-50, qui mène un combat justifié pour l’égalité femmes-hommes dans la haute fonction publique, la Cordée, dont l’objectif est la promotion de la diversité sociale dans les services publics, et enfin Des territoires aux grandes écoles, fédération visant à une meilleure égalité des chances des jeunes des zones rurales.
Six à huit entraînements aux épreuves écrites sont programmés et au moins un oral blanc pour préparer au mieux les élèves
Ils pourront aussi s’appuyer sur un système de tutorat…
En effet, dès la promotion « Gisèle Halimi », qui vient de commencer, chaque élève de l’Inet aura l’obligation d’être tuteur d’un des élèves de ces prépas Talents. Un tutorat qui a vocation à être une composante à part entière de leur parcours pédagogique.
L’enseignement reposera sur des cours magistraux, assurés par des enseignants ou des fonctionnaires en activité dans les collectivités ou les administrations de l’État. Les élèves de l’ENA interviendront dans le cadre de conférences de méthodologie.
Dès que le contexte sanitaire l’autorisera, des immersions dans les administrations publiques sont aussi prévues. Six à huit entraînements aux épreuves écrites sont programmés et au moins un oral blanc pour préparer au mieux les élèves.
La période qui s’ouvre pour les grandes écoles vise à améliorer la diversité sociale mais aussi les voies d’accès pour ces institutions
Vous travaillez aussi à l’élaboration du tronc commun du futur ISP, Institut du service public, qui remplacera l’ENA le 1er janvier 2022.
Nous participons, avec treize écoles de service public, aux travaux de conception d’un tronc commun aux élèves de ces écoles. Nous cherchons à enrichir le contenu pédagogique en intégrant cinq thématiques telles la pauvreté ou encore les transitions écologique et numérique, le rapport à la science et les valeurs de la République pour en renforcer la présence dans nos enseignements.
Les élèves de l’ENA et de l’Inet ont déjà l’habitude de travailler en commun sur des séances d’entraînement à la négociation ou encore du média training. La période qui s’ouvre pour les grandes écoles vise à améliorer la diversité sociale mais aussi les voies d’accès pour ces institutions.
Bien entendu, nos écoles ne sont pas fermées à la diversité sociale. Mais force est de constater que la grande majorité de nos élèves sont issus de classes sociales plutôt favorisées. Nous devons impérativement faire sauter ce frein psychologique qui empêche la diversité de notre pays, au sens large, de s’engager dans la carrière de cadres territoriaux alors que nos services publics s’adressent à tous nos concitoyens. Nous sommes en ordre de marche pour relever ce défi.