plan de paris
© laurent davaine
La mise en place du Grand Paris en grande couronne de l’Ile-de- France vire au vaudeville. L’acte I s’est joué le 5 février : ce jour-là, la commission régionale de coopération intercommunale (CRCI) a été le théâtre d’un nouveau rebondissement assez inattendu. Alors que le préfet de la région Ile-de-France, Jean Daubigny, s’était rendu aux « arguments (voir encadré ) » de ceux qui le poussaient à couper en deux l’intercommunalité s’étendant d’Arpajon à Sénart, les élus des Yvelines et du Val-d’Oise ont ébranlé le subtil édifice en s’abstenant massivement lors du vote de l’amendement présenté par le préfet (dix-sept abstentions et un vote pour les Yvelines, sept abstentions pour le Val-d’Oise).
« Infantilisme »
Ce comportement est d’autant plus irréel que les élus en question n’étaient pas concernés par le Grand Évry, puisque l’ensemble de 533 000 habitants se trouve en grande partie sur le territoire de l’Essonne, avec une petite portion en Seine-et-Marne. Autant dire que personne n’a compris ce qui s’était réellement passé : le président du conseil général de l’Essonne, le socialiste Jérôme Guedj, a même accusé les élus des Yvelines de faire preuve d’« infantilisme ». Rappelons que ce vote était d’autant plus complexe qu’il devait être obtenu à la majorité qualifiée des deux tiers.
Bédier bloque...
Le scénario prévu pour surmonter l’obstacle de cette contraignante majorité ne s’est donc pas déroulé comme prévu : alors que les élus des Yvelines avaient su mobiliser tous les leurs, le 22 janvier, pour démembrer le Grand Saclay, le renvoi d’ascenseur est resté bloqué entre deux étages pour le Grand Évry. Président du conseil général des Yvelines, Pierre Bédier (UMP) est montré du doigt comme le grand ordonnateur de ce blocage. « C’est la loi qui est mauvaise, leur majorité qualifiée leur retombe dessus », assure-t-il.
Alors que les élus des Yvelines avaient su mobiliser tous les leurs, le 22 janvier, pour démembrer le Grand Saclay, le renvoi d’ascenseur est resté bloqué entre deux étages pour le Grand Évry
D’autres supputent qu’il s’agit de jouer la montre en attendant les élections départementales et de nouveaux équilibres politiques. La guerre de positionnement se poursuit donc. Les élus abstentionnistes du Val-d’Oise ont profité du contexte pour protester contre la perspective d’un rattachement de la communauté d’agglomération des Portes de l’Essonne à la métropole du Grand Paris, rendue possible par le projet de loi NOTRe.
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... et le préfet débloque !
La deuxième mi-temps du match a eu lieu le 12 février et est plus gratinée encore. Mis en difficulté le 5 février, le préfet en a profité pour renvoyer les élus des Yvelines et du Val-d’Oise dans les cordes et renverser la situation le 12. Il est vrai qu’il avait menacé de figer la situation dans le statu quo, tant que les comportements des élus locaux n’évoluaient pas. Et au final, le grand perdant de ce jeu de poker reste la Seine-et- Marne. Malgré l’intervention du député UMP de Seine-et-Marne, Christian Jacob, la droite n’a pas réussi à trouver un compromis et, au final, a transformé une situation plutôt favorable en fiasco. Le conseil général de Seine-et-Marne a plié sous la pression de Matignon en acceptant de ne pas cautionner la demande de dérogation déposée par le président de l’agglo de Sénart. Le Grand Évry restera donc à gauche, à la grande satisfaction de Manuel Valls.
Malgré l’intervention de Christian Jacob, la droite n’a pas réussi à trouver un compromis et, au final, a transformé une situation plutôt favorable en fiasco
Le cauchemar de la majorité qualifiée aux deux tiers Par ailleurs, le Grand Marne-la-Vallée arrêté lors du SRCI d’août penchait clairement à droite. Du coup, le conseil général de Seine-et-Marne, présidé par le socialiste Vincent Eblé (élu à Marne-la-Vallée...), a imposé son scénario intercommunal avec deux intercos à gauche et une à droite, dans la continuité de la grande tractation entre le Grand Saclay et le Grand Évry.
Vincent Eblé obtient gain de cause et le Grand Marne-la-Vallée reste à gauche. En revanche, au nord, il se voit imposer le projet du Val-d’Oise de s’emparer de dix-sept communes seine-et-marnaises pour leur Grand Roissy. Jusqu’au bout, les marchandages se poursuivront pour « cadrer » dans cette majorité qualifiée aux deux tiers.
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