Landot-Eric
L’intercommunalité connaît-elle son apogée ?
Son succès est éclatant. Avec des structures calées sur les bassins de vie, voire d’emploi, sur les trajets domicile-travail et un partenariat prometteur avec la région…
La communauté a-t-elle changé de nature ?
La communauté ne peut plus être un simple tiroir-caisse : elle n’en a plus les moyens. Elle ne peut être un mariage blanc : les compétences transférées s’avèrent trop importantes pour se limiter aux apparences du pouvoir.
Alors que sont devenues les communautés et les métropoles ?
Les types de communautés (ou de métropoles) furent toujours divers. Aujourd’hui, ces modèles ne cessent de s’éloigner les uns des autres.
Certains EPCI ne conservent que des compétences vraiment stratégiques, ce qui est possible si on a :
- soit des communes structurées, par exemple de grandes communes nouvelles… mais ce modèle (une grande communauté – ou métropole – stratège ; de grandes communes nouvelles en charge des relations à l’habitant), souvent vertueux, n’est pas adapté au mode de calcul de la DGF…
- soit des mutualisations par pôle géographique sous la houlette (ou pas) de l’intercommunalité.
D’autres EPCI à fiscalité propre prennent de considérables compétences même en matière de relation à l’habitant, ce qui n’est pas illogique :
- soit si l’intercommunalité est à taille humaine ;
- soit si celle-ci se structure en pôles géographiques. Mais alors le modèle de la proximité est à revoir. Juridiquement, cela peut passer par divers modèles qui sont au cœur d’enjeux démocratiques majeurs.
Il y a donc une hétérogénéité croissante ?
Oui. Avec, pour enjeux, l’efficacité administrative, le lien à l’habitant, la place de l’élu et du cadre territorial, la démocratie locale… et ce, même sans évoquer l’horizon lointain d’une possible réforme du suffrage intercommunal… Reste des points communs, mais ce ne sont pas les plus flatteurs :
- un cadre rigide de compétences qui trouve ses limites ;
- un statut d’EPCI (sauf à Lyon) qui craque de toutes parts ;
- un décalage de gouvernance qui est une vraie fragilité…
La gouvernance de ces structures doit donc évoluer ?
La gouvernance tranquille, qui fit la force des projets intercommunaux, n’est que rarement adaptée à ces grands périmètres, à ces vastes compétences, à ces immenses services. Dans l’intercommunalité d’hier, il fallait un management politique et administratif de consensus, par petites touches. S’impose aujourd’hui, pour ces vastes compétences et ces immenses territoires, une action efficace, qui ne peut pas, ou pas toujours, conduire à perdre à chaque fois six mois juste le temps que dans chaque mairie les grognements s’estompent.
Ces gouvernances ne se sont-elles pas forgées, justement, au fil des fusions et des transferts de compétences ?
Une habitude de travail s’est forgée, sur mesure, un peu partout. Mais, et la faute en incombe aux deux derniers quinquennats, chacun sort épuisé de mandats consommés, voire consumés, à gérer des fusions et des transferts mal acceptés car imposés. À tort ou à raison, ces derniers ont conduit l’intercommunalité à ne plus être perçue comme ce territoire de projets, de bâtisseurs, fondé sur l’enthousiasme et la volonté de ses acteurs qu’elle avait souvent été initialement… mais à faire figure, à tort, de lieu lourd en réunions techniques à répétition, sur des sujets imposés d’en haut.
Vous en appelez donc à un retour de l’enthousiasme ?
Bien sûr, mais cela ne se décrète pas. Au-delà de la technique, juridique, ingéniériale et financière, interrogeons-nous sur la pertinence de ce qui est construit… pour vraiment bâtir, chaque communauté, sur mesure. Ce n’est qu’avec du sur-mesure (ce que permettent les conventions, les mutualisations zonées, les pactes financiers et fiscaux, les projets de territoire…) et une association des communes (élus et cadres) à la vie intercommunale qu’on pourra retrouver un peu d’enthousiasme, de plaisir, de vision partagée… Un vrai programme de sortie de crise de la quarantaine !