Interview

Jean Laudouar et Anne Tavernier : "nous souhaitons sensibiliser les acteurs publics à des modèles de gestion compatibles avec le vivant"

Jean Laudouar et Anne Tavernier :

© Adobestock

La 27e région a lancé un programme de recherche-action pour sensibiliser les acteurs publics à des modèles de gestion compatibles avec le vivant. Explication des coordinateurs de ce programme.

Jean Laudouar est chef de projet du programme Nouvelles mesures. Anne Tavernier est directrice administrative et financière de la 27e région et coordinatrice du programme Nouvelles mesures.

À quand remonte votre intérêt pour les questions de comptabilité écologique et sociale ?

Nous nous sommes intéressés à une autre approche de la comptabilité en effectuant une série de voyages apprenants en Europe entre 2018 et 2019, portant sur les initiatives publiques et privées autour de la notion de communs. Le but est de repenser les outils de pilotage des organisations pour piloter les projets de communs. Comment par exemple, lorsqu’on est un territoire zéro chômeur longue durée, montrer que l’on crée de la valeur sociale et environnementale ? Un premier groupe exploratoire est né de cette démarche.

« Nous sentons une volonté des collectivités d’explorer ces questions, mais la démarche exploratoire est insécurisante »

En parallèle, nous avons intégré le sous-groupe « alliance comptabilité régénération » de l’organisation Tek4life. Des entreprises et grands groupes travaillent à la transformation des normes comptables européennes, avec en arrière-plan la taxonomie verte. En les rejoignant, nous avons constaté l’absence quasi totale de l’acteur public au sein de ces expérimentations, hormis la ville de Grenoble qui participe à ces échanges. Ces premières démarches nous ont convaincus de la non-neutralité de la comptabilité et de sa dimension politique. C’est bien à l’endroit des budgets que les organisations stratégiques sont prises.

| Lire aussi :  La 27e Région, au service de l’innovation publique |

Et vous avez décidé de lancer votre propre programme, Nouvelles mesures ?

Oui, c’est un programme de recherche-action par lequel nous souhaitons sensibiliser les acteurs publics à des modèles de gestion compatibles avec le vivant. Sa première phase a commencé en juin 2021 par un moment d’enquête collective, qui s’est arrêté en décembre dernier. Six collectivités participent : la ville de Clermont-Ferrand, la ville de Grenoble et la métropole, la métropole de Lille, les départements de la Gironde et de Loire-Atlantique.

Quel était le but de cette première phase ?

Nous avons procédé à un état des lieux pour savoir quelle était la réflexion des collectivités sur ces sujets. Quand elles ont exploré les budgets verts, parfois les budgets carbone, elles jugent ces outils pas nécessairement très porteurs car ne permettant pas de faire évoluer les décisions prises. Cela a été à la fois une phase de diagnostic et d’acculturation. Nous sentons une volonté des collectivités d’explorer ces questions, mais la démarche exploratoire est insécurisante. Monter un programme collectif et créer des terrains d’expérimentation pour s’épauler dans cette aventure-là permet d’évoluer plus sereinement.

« Les projets consisteront à rendre visibles les externalités négatives sur un sujet »

La première étape terminée, quelles sont les suivantes ?

Nous entrons bientôt dans une phase d’expérimentation, qui sera suivie par une phase de diffusion, bilan et enseignement. Nous nous dirigeons vers trois thématiques. La première est sans doute le secteur culturel, en prenant par exemple un ou deux équipements où l’on établira une liste de tests qui seront pensés avec la direction des finances, des services culturels, de l’innovation de la collectivité… Ensuite, le second thème pourrait être un travail à l’échelle d’une filière comme la restauration collective : comment créer une dynamique territoriale autour d’une filière, entre collectivité et acteurs locaux ?

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Le numérique pourrait être un troisième thème, mais nous nous laissons jusqu’au mois d’avril pour définir les formes d’expérimentation et les protocoles à développer. Dans chaque cas, les projets consisteront à rendre visibles les externalités négatives sur un sujet, sur les ressources naturelles et sur les personnes, pour faire évoluer ces données. Une cartographie recense les outils et méthodes que l’on a retenus avec les collectivités participantes. On se donne ensuite jusqu’à l’été 2023 pour mettre en place les expérimentations et récolter les données. Enfin, nous pourrons partager les résultats de ces tests grandeur nature, que l’on envisage dès maintenant comme réplicables à d’autres structures ou à d’autres échelles.

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