Et hop !
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Leurs objectifs, leurs méthodes et leur financement diffèrent. Et pourtant il n’est pas interdit de comparer le public au privé, au moins pour montrer que le premier agit aussi rapidement que le second. Répondre à l'impérieuse demande sociale et politique, c’est tout l’art du métier de directeur général d'une collectivité.
Par Sébastien Duval, DGS de la commune nouvelle de Moret-Loing-et-Orvanne (77)
Nous ne sommes pas tous issus des grandes écoles, des business schools, ou titulaires de MBA de cadres dirigeants, mais nous devons tous mener des grands projets, créer et transformer des activités, optimiser nos dépenses ou redresser nos structures. Nous n’avons pas tous les moyens de nous appuyer sur de grands cabinets. Et pourtant, l’agilité et la capacité d’adaptation, nous l’avons. La crise du Covid l’a rappelé.
Suis-je dans la caricature ou la réalité « du terrain » si j'affirme que nous sommes en première ligne avec nos personnels, qui sont parfois peu qualifiés, peu expérimentés, peu diplômés. Nos personnels appartiennent à plus de 80% à la catégorie C, et exercent des métiers non télétravaillables, car ils sont au contact du public, un public de plus en plus exigeant.
Nous sommes devenus responsables dans l’engagement de la dépense publique : arbitrage des investissements, évaluation des coûts globaux en lien avec les politiques publiques
Alors, oui, les DG doivent faire face immédiatement à des demandes multiples, répondre aux besoins de la population, du politique, des partenaires et de leurs propres agents, dans une organisation qui fonctionne 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, comme le font certaines usines.
Et nous devons satisfaire tout le monde avec une certaine agilité, pour conduire les nombreux projets de nos édiles et des transformations profondes comme celles liées à la transition énergétique.
« Je ne suis pas diplomate à l’international, mais du local »
Cette agilité, je l’exprime, je la partage, je la vis, pour répondre dans la minute au président de club qui souhaite que la porte du gymnase soit réparée. Dois-je ménager avec agilité la susceptibilité du corps enseignant qui pense que la collectivité leur doit tout ? Faut-il être agile pour construire un équipement public en 1 an, pour nourrir 1.500 enfants à la pause méridienne, pour anticiper les effets de 500 à 1.000 logements de plus sur 10 hectares, pour régler le souci du parent qui n’est pas venu chercher son enfant après 19 heures au périscolaire…
Oui, l’Etat nous le rappelle : à défaut d'être rentable, le service public se doit d'être efficient.
Non, je ne suis pas diplomate à l’international, mais du local. Je dois créer un environnement stable tant pour les agents que pour les administrés. Et ainsi conduire avec agilité, prudence, des projets parfois difficiles.
Oui, l’Etat nous le rappelle : à défaut d'être rentable, le service public se doit d'être efficient. Une nécessité qui découle notamment de la baisse des dotations et qui nous contraint à une nouvelle construction de la dépense publique : évaluation des coûts, optimisation des investissements, rationalisation des moyens... Nous sommes devenus responsables dans l’engagement de la dépense publique : arbitrage des investissements, évaluation des coûts globaux en lien avec les politiques publiques. Bref, des gestionnaires.
Nos usagers ont le comportement de clients de services public et nos services des fournisseurs de services publics. Nos directions et nos services ressemblent peu à peu à des business unit « centres de profit », à qui nous demandons de faire du contrôle de gestion. Nos manageurs ont un référentiel du CNFPT qui imbrique des notions de gestion (finance, RH, achat, droit, communication, etc.), et dans de nombreuses annonces nous indiquons « élaborer et piloter la stratégie de gestion et d’optimisation des ressources ».
L’agilité, cela signifie être en veille permanente, et cela dans tous les domaines car notre champ d’action est multiple.
Nous ne faisons pas du profit mais générons des excédents pour augmenter notre part d’autofinancement dans des projets d’investissement. Nous segmentons nos activités dans nos organigrammes en pôles, notre étude de marché s’appelle ABS (analyse des besoins sociaux), projet de territoire, plan communal de développement dont découlent non pas nos produits mes nos services.
« Assumer son choix et accepter la possibilité de se tromper »
L’agilité, cela signifie être en veille permanente, et cela dans tous les domaines car notre champ d’action est multiple. Apprendre à repérer les problèmes potentiels et même à les anticiper. Être dans l’écoute et la co-construction.
C’est être honnête, transparent et savoir contextualiser nos choix ; expliquer une décision, la rendre plus acceptable pour qu’elle prenne sens. Cette même quête de sens qui se développe particulièrement chez les nos jeunes collaborateurs.
C’est être authentique et rendre humaine la fonction en accompagnant nos équipes.
Admettre sa responsabilité, c’est être capable d’apporter une réponse et de rectifier le tir.
C’est remettre de la confiance dans le travail, apprendre à déléguer, à ouvrir tous les champs du possible, pour apporter de nouvelles idées, de nouvelles solutions.
C’est être décisif, en affirmant sa posture. C’est assumer son choix et accepter la possibilité de se tromper en reconnaissant son erreur. Admettre sa responsabilité, c’est être capable d’apporter une réponse et de rectifier le tir.
C’est l’optimisme, cette capacité d'analyser notre environnement et de mettre tout mettre en œuvre pour que le succès et le sens soient au rendez-vous.
Et pour vous c’est quoi être agile ?