La Transfo, saison 2

Marjolaine Koch

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La Transfo, saison 2

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Deux ans après une première édition réussie avec quatre régions, la 27e région a lancé un nouveau programme expérimental visant à accompagner un groupe de collectivités dans la création de leur propre labo d’innovation.

Dix-huit mois d’accompagnement pour lancer son propre laboratoire d’innovation, dans des conditions optimales pour aboutir à un résultat probant. Voilà ce que propose, sous le nom de La Transfo, la 27e Région, le « do tank » qui milite pour une modernisation des services publics qui viendrait de l’intérieur. Pour y parvenir, l’association, née en 2012, établit des programmes de recherche-action explorant de nouvelles façons de concevoir ces politiques publiques. Leur principe : faire intervenir les agents, mais aussi les usagers, pour améliorer les processus existants.

Lire aussi : Le design au service des politiques publiques

Des régions devenues autonomes dans l’innovation

Une première session, qui s’est tenue entre 2011 et 2014, avait déjà permis aux régions Champagne-Ardenne, Pays de la Loire et Provence-Alpes-Côte d’Azur de créer leurs propres labos d'innovation. Désormais autonomes, ils ont conduit une dizaine de projets variés, comme la facilitation du parcours d’un porteur de projet lors d’une demande de subvention, la réhabilitation d’espaces de travail de la région, ou encore la clarification de la prise en charge des formations dans les instituts sanitaires et sociaux. Quel que soit le thème, tout sujet nécessitant une amélioration peut être pris en charge : c’est l’ambition de ces laboratoires, très souples au niveau organisationnel.

« Il faut apprendre à avoir des projets un peu pirates que l’on fait évoluer en parallèle ; c’est révolutionnaire dans une collectivité. »

Très souples, et pour cause : « personne ne peut présumer au départ de la forme et du fonctionnement du futur labo d’innovation » explique l’association. L’idée est d’accompagner, en interne et suivant un protocole précis mais très ouvert (voir encadré), les agents impliqués dans la constitution de ce labo. « Les participants construisent ensemble, étape par étape, les scénarios, la stratégie, le positionnement et les outils les plus adaptés à leur organisation » poursuit le document de présentation. Pour Stéphane Vincent, délégué général de la 27e Région, « il faut travailler sous le radar dans un premier temps », pour se rôder, tester des méthodes, trouver ses marques. « Il faut apprendre à avoir des projets un peu pirates que l’on fait évoluer en parallèle : c’est quelque chose de révolutionnaire dans une collectivité, car les labos racontent une autre façon de s’organiser, de coopérer. C’est un endroit où l’on peut réinterroger les politiques publiques sans que ce soit mal vécu par les services. Repenser un fonctionnement, c’est entrer en porte-à-faux avec les élus ou la direction sur les politiques publiques, avec un ordre établi. »

Un protocole précis
Au lancement d’un labo dans le cadre de La Transfo, le programme est le suivant :
• La 27e Région mandate une équipe pluridisciplinaire de trois personnes. Cette équipe est constituée de professionnels expérimentés : designers, sociologues, urbanistes, spécialistes en ingénierie de la participation… Des personnes habituées à travailler avec des administrations et des collectivités publiques. On les appelle les résidents.
• Chaque collectivité sélectionne un groupe de vingt agents, issus d’une grande diversité de directions et de champs de politiques publiques, tous volontaires pour participer au programme et encouragés pour cela par leur hiérarchie. Ce sont les ambassadeurs.
• Tous prennent part à des sessions successives de travaux pratiques, conduites par les résidents, qui portent notamment sur des cas réels fournis par la collectivité. Ces sessions représentent 35 jours au total, à raison de séquences de 2 à 3 jours d’affilée, réparties sur 12 à 18 mois.
• Les équipes sont encouragées à construire leurs propres méthodes, approches et outils, adaptés au contexte de la collectivité et à son organisation, ainsi qu’aux projets et politiques choisis comme terrains d’essai (chaque collectivité doit choisir une thématique, par exemple les politiques jeunesse, la mobilité, la lutte contre l’exclusion etc.). Les agents participants sont progressivement formés à ces méthodes dans une logique d’expérimentation et d’empowerment.


Lire aussi : La France, terre de fab' labs

Tout le monde doit changer

Dans un premier temps, les laboratoires se « font la main » sur des sujets simples, pour tester leur fonctionnement. Ensuite, ils peuvent monter en puissance. Mais pour que les résultats soient probants, il n’y a pas de miracle : il faut, avant tout, que la direction approuve et accompagne ce mouvement. « Il faut y associer les élus, détaille Stéphane Vincent. S’ils n’acceptent pas de changer leur rapport au pouvoir, cela ne fonctionne pas. » Les directions intermédiaires doivent aussi prendre le virage : « on voit arriver une génération qui a intégré cet état d’esprit, même si les résistances se situent souvent à ce niveau ».

Les responsables, élus et direction, doivent trouver la bonne distance pour que les membres du labo se sentent libres de proposer et d’innover.

Dans tous les cas, le juste dosage doit être soigneusement étudié, car les responsables, élus et direction, doivent trouver la bonne distance pour que les membres du labo se sentent libres de proposer et d’innover. Un aspect évidemment suivi de près par les accompagnateurs de la 27e Région.

Objectif : dix collectivités accompagnées

Pour cette deuxième session qui prendra fin en 2020, La Transfo espère accompagner jusqu’à dix collectivités. Et bonne nouvelle : il reste encore de la place, puisque, actuellement, sont engagées Mulhouse, Paris, la Communauté urbaine de Dunkerque et la Région Occitanie. Des discussions sont entamées avec trois autres collectivités. Les villes, métropoles, départements, régions ou grands établissements publics intéressés peuvent encore contacter la 27e Région pour rejoindre le programme.

L’impact du projet est évalué selon quatre valeurs, de démocratie, de qualité, d’impact et de productivité.

Sur le plan financier, le coût d’une Transfo est réparti entre les collectivités et établissements participants (à hauteur des 2/3 environ) et l’apport de grands partenaires (dernier 1/3). La participation financière des collectivités prend la forme d’une adhésion et d’une subvention versée à la 27e Région au titre du programme inter-collectivités La Transfo. Cet accompagnement en interne est enrichi de rencontres entre les collectivités participant au programme, pour échanger sur les méthodes et réflexions de chacun (voir encadré calendrier). Enfin, l’impact du projet est évalué selon quatre valeurs, de démocratie (pour un système plus transparent et responsable), de qualité (l’amélioration de l’expérience utilisateur des services publics), d’impact (que les efforts produisent des résultats désirables) et de productivité (établir un rapport plus favorable entre les input et les output).

Soutenue par Bloomberg Philantropies, la fondation de l’ancien maire de New-York, l’initiative permet de se lancer sur la rampe de l’innovation dans un cadre rassurant, tant pour les agents que pour les dirigeants. Charge à eux de parvenir à transformer l’essai par la suite pour que les changements ne procèdent pas de l’exception mais deviennent bien les nouvelles règles de fonctionnement en interne, au fil des ans.

Voir aussi notre dossier : Quand Bloomberg récompense les initiatives locales

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