Open data : les Etats-Unis donnent l’exemple

Marjolaine Koch

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Open data : les Etats-Unis donnent l’exemple

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La mise à disposition des données publiques a du bon : plus en avance que la France, les États-Unis peuvent déjà tirer un premier bilan de l’utilisation qui est faite de ces données. D’après un rapport sorti à l’automne, l’amélioration du quotidien des citoyens est notable, et quantifiable bien sûr.

Dans le domaine de l’open data (comme dans quelques autres…), les États-Unis ont un train d’avance sur la France et sur l’Europe. De plus en plus de villes utilisent les données publiques pour obtenir de meilleurs résultats aux fins de mieux servir leurs citoyens.

L’open data est l’outil de départ : une fois que ces données numériques d’origine privée ou publique sont rassemblées, l’organisme qui les agglomère, dissèque et synthétise, peut alors en tirer des enseignements utiles en matière de prévention, de réorientation d’une action ou de classement des performances de certains établissements.
Cette tendance, qui s’est considérablement répandue ces dernières années outre-Atlantique, est dorénavant assez développée pour qu’un premier rapport ait pu voir le jour cet automne. Réalisé par l’organisation à but non lucratif America Achieves sur la demande de The Bridgespan Group, 45 experts urbains et leaders municipaux américains ont été interrogés afin de mieux comprendre comment les villes américaines les plus innovantes utilisent les données pour mener une action plus performante.

Améliorer le service public et le quotidien des personnes

Cette série d’entretiens a permis de mettre au jour les thèmes les plus porteurs : l’éducation, l’emploi, l’accompagnement et le développement des jeunes, ainsi que la prévention de la mortalité infantile. Dans ces domaines d’après le rapport, le rassemblement et l’analyse des données permet non seulement d’accroître l’efficacité des services publics, mais aussi d’améliorer le quotidien des personnes.

À Miami, Denver ou New York, l’open data est utilisé pour améliorer les résultats des enfants à l’école, en observant par exemple quelles méthodes et organisations aboutissent aux meilleurs résultats.
À San Antonio, Providence et Baltimore, les analyses qui en émanent permettent d’investir plus dans les actions qui font leurs preuves. La mise en place d’outils d’évaluation à une échelle plus globale – par exemple, une ville au lieu d’un établissement – permet de mieux cibler et développer les projets porteurs, mais aussi d’abandonner plus rapidement ceux qui ne fonctionnent pas.

Londres, exemple à suivre
Lancé début 2013, le projet londonien Oracle a pour vocation d’améliorer le suivi et l’encadrement des enfants et jeunes adultes dans la capitale britannique. Pour cela, il a été décidé de permettre au plus grand nombre, acteurs publics ou privés, de faire usage de l’open data et de ses ressources.

Un panel de choix a été réuni pour créer un partenariat social innovant : la mairie, la métropole du Grand Londres, le conseil de recherche économique et sociale de Grande-Bretagne, le bureau municipal de police et de prévention du crime, le programme NESTA pour l’invention et l’innovation, ainsi que la London Metropolitan University ont réuni leurs compétences. Ensemble, ils fournissent les capacités de recherche et de formation aux associations et organisations non gouvernementales qui le souhaitent, pour les aider à développer leur base de données, mais aussi synthétiser leurs résultats afin d’en tirer une évaluation.

En moins d’un an, 120 agences et organismes liés à la jeunesse ont autoévalué leurs ressources en termes de données, et ont été entraînés à évaluer l’impact de leur programme. Grâce à la mise en lumière des actions porteuses ou au contraire, moins performantes qu’elles auraient dû l’être, ces organismes devraient être capables d’améliorer leur accompagnement auprès des jeunes et de mettre en place un processus de décision plus pertinent.

Baltimore fait son budget grâce à l’open data

Si pour l’instant, les données publiques ne sont pas ouvertes en assez grand nombre sur le territoire français, voici quelques usages qui pourraient en être faits le jour où cela arrivera jusqu’à nos côtes. Bien sûr, en termes d’éducation, les exemples seraient difficilement reproductibles : les villes des États-Unis ont une autonomie bien plus grande en la matière.

Cependant, sur le thème de la gestion du budget des villes, l’exemple de Baltimore est intéressant. En 2009, la commune a choisi d’établir son budget selon une nouvelle méthode. Plutôt que de penser en termes de départements étanches et bien distincts, les budgets ont été alloués en établissant une liste de « réalisations prioritaires » qui ressemblent à un prospectus électoral : « de meilleures écoles », « des rues plus sûres »…

Mais un travail de fond a bien eu lieu pour chaque thème : des équipes chargées d’éplucher les résultats ont été constituées, composées de membres de l’administration, d’experts techniques, d’analystes financiers et de résidents. Les résultats issus de cette organisation révolutionnaire n’ont pas tardé : même en période de sérieuses coupes budgétaires, Baltimore a pu augmenter ses fonds pour des programmes ayant donné des résultats et a même pu allouer des ressources à un fonds d’innovation, en éliminant les services qui ne se montraient pas assez efficaces ou utiles. Reste à vérifier si, avec cette méthode, des pans de la population moins intéressants « électoralement parlant » ne tombent pas dans les oubliettes de l’open data…

Open data France, les précurseurs français
Depuis le 9 octobre, la France compte officiellement un nouvel acteur de l’open data : Open data France, une association dont le but est « de regrouper et soutenir les collectivités engagées activement dans une démarche d’ouverture des données publiques ».
L’un des pionniers à l’origine d’Open data France est Jean-Marie Bourgogne, agent en charge du programme « Montpellier territoire numérique ». Pour lui, « les États-Unis ont commencé à s’intéresser à ce sujet 10 ans avant nous, mais maintenant, nous n’accusons pas plus de trois ou quatre ans de retard sur eux. De plus, la culture de la transparence qui les habite est bien différente de celle de la France. Chez nous, la tendance est de conserver jalousement ses informations. Si les collectivités et les ministères s’y sont mis, beaucoup d’acteurs (universités, hôpitaux…) restent réfractaires ».
Ajoutez à cela que les marchés délégués conclus par les collectivités, comme le nettoyage ou les transports, n’ont pas intégré l’aspect open data. « Ces opérateurs n’ont pas envie de partager ces données. Nous en sommes au stade d’introduire des clauses lors des renouvellements de contrats afin que les données produites dans le cadre d’une prestation de service public reviennent à la collectivité. C’est le type de problématique que nous rencontrons actuellement. » La plus grande problématique restant sans aucun doute la méconnaissance du grand public pour l’open data, un outil qui, bien exploité et suffisamment nourri, permettrait d’offrir une transparence de la vie publique jamais atteinte jusque-là.

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