Pontevedra
© Guillermo@GuillermoGonzalez.com
20 000 véhicules par jour
Avec ses 83 000 habitants étalés sur 118 km², Pontevedra est une ville moyenne, pas assez dense pour pouvoir développer un réseau de transports en commun efficace, et toute dévouée à la voiture. Cependant, elle a un avantage que son maire, Miguel Anxo Fernández Lores, a tout de suite repéré : 51 000 habitants vivent sur 3,5 km², dans l’hypercentre. Un hypercentre qui, il y a quinze ans encore, pouvait voir défiler 20 000 véhicules par jour sur certaines artères. Un enfer pour les piétons. « L’objectif, explique Jesús Gomez Viñas, ingénieur municipal, était de parvenir à réaménager un espace non agressif, qui soit une continuité de leur propre maison. »Si aucune solution ne fonctionne avec les voitures, autant les éradiquer, s’est dit le maire.La tâche a nécessité quelques ajustements : au départ, tous les carrefours furent équipés de feux. Toutefois, au lieu de réguler la circulation, cette solution provoqua d’immenses blocages dans toute la ville. La mise en place d’une taxe pour se garer fut, elle aussi, un échec.Si aucune solution ne fonctionne avec les voitures, autant les éradiquer, se dit le maire. Le pari est alors pris de passer au tout piéton : après tout, cette méthode est parfaitement viable tant que l’on reste dans un rayon de trois kilomètres. Désormais, seuls les résidents, les livreurs et les véhicules d’urgence ont le droit de circuler. En 2010, la vitesse passe même à 30 km/h dans l’aire urbaine. D’immenses parkings gratuits sont aménagés tout autour du centre, au maximum à dix minutes de marche.Peu à peu, les voies autour de la zone rendue piétonne sont transformées : deux trottoirs de 4,5 m apparaissent, chacun entourant une voie à sens unique de trois mètres, l’inverse des règles habituelles. Sur ces voies, de nombreux dos d’âne sont aménagés, non seulement pour réguler la vitesse, mais aussi pour assurer aux personnes à mobilité réduite la possibilité de traverser sans encombre. Ces aménagements, estime la mairie, lui coûtent environ 8 millions d’euros par an. Une bagatelle. Au passage, pour s’assurer de la réussite et de l’implication de tous, l’organisation interne de la ville s’est faite plus transversale : culture, sport ou police, tous ont planché sur le moyen dont leur service pouvait améliorer l’espace urbain.
Pas de demi-solutions
Cette petite révolution n’a pas eu lieu sans heurts et le maire a essuyé quelques manifestations de ses 3 000 commerçants en colère. Il fallait résister, ne pas abandonner une partie du projet à la voiture, sans quoi, assure Miguel Fernández Lores, « des demi-solutions auraient conduit à l’échec de l’ensemble ».Au moment du lancement, restait une inconnue : les habitants allaient-ils entrer dans le jeu – la Galice est une région pluvieuse, il y avait de quoi être réticent à la marche – ou bien se tourner vers l’extérieur ? Heureusement, le doute a rapidement disparu : les commerces se sont développés grâce à l’afflux de piétons qui passent devant les boutiques.Les commerces se sont développés grâce à l’afflux de piétons qui passent devant les boutiques.En 2011, une étude sur la mobilité montrait les changements drastiques d’habitudes : 66 % des déplacements se font à pied, 6 % à vélo, 3 à 4 % en transports publics, 22 % en voiture. Si la voiture a autant perdu de sa superbe, le piéton y est pour quelque chose : devenu obstacle naturel, il n’encourage pas les automobilistes à s’aventurer dans le centre.Si la situation au cœur de la ville est idyllique, on note toutefois dans ses environs un transfert d’une partie de la circulation : la rocade accuse une augmentation de fréquentation de 32 % et un pont supplémentaire a été aménagé pour absorber l’afflux de véhicules.Il n’est pas dit que les habitants de cette zone ont gagné en confort de vie. De plus, le manque de coordination entre les différentes administrations en charge de la gestion du trafic est tel qu’il ne permet pas de proposer une alternative satisfaisante au niveau des transports publics pour l’agglomération. Ce qui fait dire au maire que, encore une fois, rien n’est gagné pour décrocher un nouveau mandat.
Metrominuto, Pasominuto et bientôt Velometro
Récompensée par l’organisation Intermodes ((Intermodes est une organisation qui se consacre à la promotion de la mobilité durable et de l’intermodalité du transport de voyageurs en Europe.)) pour son Metrominuto, la ville de Pontevedra est précurseur en la matière. Le maire, également médecin, a inventé avec son équipe la première carte de déplacement piéton calquée sur un plan de métro : noms de stations, couleurs des lignes, tout y est ! Cette solution, en plus d’être ludique et non invasive (le maire refusait l’idée d’installer quantité de panneaux dans la ville indiquant la durée de trajet entre un point et un autre), permet aux habitants de prendre conscience du peu de temps qu’il faut pour rejoindre un lieu. Depuis sa création en 1999, plusieurs villes ont suivi cet exemple, comme Toulouse, Florence (Italie), Jerez (Andalousie) ou Cagliari (Sardaigne). Dans le même esprit, Pasominuto est une carte de promenades dans les environs de la ville, indiquant la durée, le nombre de pas et la difficulté du parcours. Prochainement, une carte Velometro suivra ce même schéma. Une nécessité, selon le maire, pour améliorer la santé de ses concitoyens.