vue aérienne
© AdobeStock
Les élus sont tous verts... de rage ou de conviction. Alors que le ciel leur tombe de plus en plus souvent sur la tête, face à un réchauffement climatique dont l’évidence ne fait plus débat, certains maires ont clairement fait le choix de limiter l’étalement urbain.
Lire l'article précédent de ce dossier : Face au désastre de l’étalement urbain, des élus inquiets et frileux
Le Pays de Châteaugiron (Ille-et-Vilaine) a ainsi décidé d’expérimenter le système Bimby. Il consiste à vendre une partie de son terrain trop grand à entretenir ou d’y construire une maison de plain-pied en prévision de ses vieux jours, en revendant bien entendu celle dans laquelle on vit. Bimby mais aussi Bunti sont ainsi des opérations qui connaissent une certaine vogue depuis 2013.
L’objectif est d’accueillir de nouveaux habitants tout en préservant les terres agricoles et naturelles
« Nous misons sur la capacité des habitants à coproduire la ville et à penser ainsi, à nos côtés, à un modèle de développement urbain répondant à leurs attentes et respectueux de l’environnement », assure Dominique Denieul, président du Pays de Châteaugiron Communauté. Une convention a été signée le 12 février dernier pour lancer l’expérimentation. Missionnés par la collectivité, les professionnels de l’urbanisme de l’équipe du LIV (Laboratoire R & D de Villes Vivantes) répondent aux questions des habitants, modélisent leur projet en 3D et accompagnent les plus curieux dans des démarches de financement. L’objectif est d’accueillir de nouveaux habitants tout en préservant les terres agricoles et naturelles.
Construire dans la zone agglomérée
À Mazières-de-Touraine (Indre-et-Loire), le maire a haussé le ton. Et a eu gain de cause face à un projet de création d’un lotissement sur sa commune. Les propriétaires, un père (décédé en septembre 2020) et sa fille, demandaient à la justice administrative d’annuler le « sursis à statuer » de deux ans qui avait été opposé en juillet 2017 au projet de division de leurs terres en huit lots constructibles. Le maire considérait en effet que ce lotissement se mettait en travers de son futur plan local d’urbanisme, adopté en mars 2018, classant les parcelles concernées en zone naturelle ou agricole.
« Il appartient aux auteurs d’un PLU de déterminer le parti d’aménagement pour le territoire concerné »
« Il appartient aux auteurs d’un plan local d’urbanisme de déterminer le parti d’aménagement à retenir pour le territoire concerné », a confirmé la cour administrative d’appel de Nantes dans son arrêt. La mairie souhaite organiser « le potentiel constructible prioritairement à l’intérieur de la zone agglomérée », la parcelle conflictuelle jouxtant une zone naturelle.
TÉMOIGNAGE
« Repartir des emprises foncières telles qu’elles existent »
« L’étalement urbain est l’un des aspects du problème. D’autres facteurs expliquent le fait que les sols soient imperméabilisés, comme le bitume dans les villes ou certains types d’agriculture. Certains maires travaillent sur une logique de « hameau », comme dans les Cévennes, pour éviter que les services au public soient trop éloignés des lieux d’habitation, sans dispersion ni extension urbaine. La gestion de l’urbanisme s’avère souvent, désormais, à l’échelle des intercommunalités, ce qui devrait aider les maires à résister aux pressions des habitants. Pour atteindre l’objectif de désartificialisation des sols, il faut utiliser les friches urbaines ou industrielles, en prenant en compte le problème de dépollution des sols, qui doit être plus ou moins poussée selon la destination future du lieu. Implanter des logements impliquera une dépollution plus onéreuse qu’une nouvelle usine. Se pose aussi la question de l’utilisation des emprises foncières telles qu’elles existent aujourd’hui, avec plus de densification (comblement des dents creuses), de verticalité mais aussi de traitement des logements vacants dont la remise sur le marché locatif éviterait de construire ailleurs du logement. La densification urbaine, notamment dans les villes moyennes menacées il y a peu par le départ de ces habitants, permettra à certains centres-villes et centres bourgs de retrouver une certaine attractivité, portée notamment par le programme Action Cœur de ville ».
Éric Landot, avocat spécialisé en droit public
Toulouse retoqué pour avoir surestimé les besoins fonciers
Ailleurs, la justice s’en mêle. Elle a ainsi décidé d’annuler le plan local d’urbanisme de la métropole toulousaine, voté en avril 2019, sans toutefois définir de date d’effet de cette annulation. Le tribunal administratif a estimé que « l’analyse de la consommation d’espaces naturels et agricoles au cours des dix années précédant l’approbation du PLUIH [plan local d’urbanisme intercommunal intégrant le programme local de l’habitat, ndlr] et la justification des objectifs de modération de ces consommations retenues par le projet d’aménagement et de développement durables (PADD) présentaient des insuffisances substantielles ».
« L’absence de prise en compte des données récentes avait conduit les auteurs du PLUIH à surestimer la consommation d’espace »
La justice a considéré que « l’absence de prise en compte des données récentes avait conduit les auteurs du PLUIH à surestimer la consommation d’espace passée et à surévaluer les besoins fonciers résultant des prévisions économiques et démographiques ». Jean-Luc Moudenc, président de la métropole, avait alerté en amont que « les conséquences d’une annulation seraient très dommageables pour le logement social », estimant que quatre ans de travail seraient « rayés d’un trait de plume ».
Lire la suite de ce dossier : Montréal bat la campagne pour refaire aimer la ville