Le service est fondamentalement co-construit
Mais cet ouvrage n’est pas une success-story ou une leçon de prêt à manager. C’est une analyse de la France à partir, comme le dit l’auteur, de cette « petite France » qu’est La Poste. Dans ce pays, plutôt rétif au service (car celui-ci résonne comme domesticité, dans une nation pétrie d’égalité), il est possible de creuser un sillon de transformations, à la fois favorable aux prestataires et aux destinataires, aux agents et aux usagers, aux collaborateurs et aux clients. Chacun choisira son vocabulaire.Au titre de la sémantique et de la philosophie générale, Xavier Quérat-Hément nous épargne heureusement les digressions habituelles théorisantes et peu opératoires. Sa posture générale n’est pas au service de l’esprit (la formule s’imposait au regard du titre du livre), ni à celui de la hiérarchie ou de l’actionnaire, mais bien à celui du destinataire du service et de celui qui le fournit.Concrètement, il faut, dans la relation de service, en face en face, du sourire (accompagnant les anciennes formations BMA : pour Bonjour, Merci, Au revoir). Mais il faut surtout, tout le temps, en back comme en front office, de l’attention et de la considération. Et il en faut pour digérer l’ensemble des révolutions (servicielles, numériques) qui ont un puissant impact sur les traditionnels réseaux et métiers de service. Les attentes en termes de personnalisation de la relation vont probablement aller toujours croissant, et vont peser sur les organisations, au premier chef sur les personnels en contact direct avec un public de plus en plus exigeant (et ce public c’est nous tous).Pour gérer la centration nécessaire sur les relations avec les clients, il ne suffit pas de les déclarer prioritaires.
La symétrie des attentions
Pour gérer cette centration nécessaire sur les clients et sur les relations avec eux, il ne suffit pas de les déclarer prioritaires. Il faut vraiment qu’ils le soient, mais (paradoxe ?) tout autant que les collaborateurs de l’entreprise. Une bonne relation de service passe d’abord, ou au moins aussi (si l’on peut dire), par une bonne relation de management. Un collaborateur satisfait est un collaborateur qui peut satisfaire.C’est peut-être là la principale leçon de l’« esprit de service » selon Xavier Quérat-Hément. Tout tient dans cette « symétrie des attentions » (en externe comme en interne) qui n’est cependant possible que dans l’unité de l’entreprise au regard de ses clients. Et ceci ne s’enseigne pas ex cathedra. Ceci ne s’impose pas. Le rôle du réformateur et du manager est de permettre les conditions de l’apprentissage, par appropriation.Un collaborateur satisfait est un collaborateur qui peut satisfaire. C’est la principale leçon de l’esprit de service.Xavier Quérat-Hément ne nous raconte pas une histoire. Il monte en généralité à partir de ses observations et expériences. Il en ressort non pas une liste d’ingrédients pour la recette magique de la qualité, mais une véritable stratégie intégrée. Curieusement l’esprit de service n’est pas, d’abord, un état d’esprit mais une stratégie.Nous rappelant, prosaïquement et sans lyrisme, que le capital de l’entreprise est d’abord du capital humain, cet ouvrage s’envisage et se déroule à partir d’une optique confiante et positive. Ce qui est rare aujourd’hui.