ACTU_534-Etude copie
À l’heure où le fonctionnement démocratique des intercommunalités interroge, France urbaine et l’Assemblée des communautés de France (AdCF) ont souhaité en savoir plus sur les modes d’organisation politiques et administratifs progressivement construits et expérimentés par les élus urbains pour coopérer et agir à l’échelle de leur bassin de vie.
En effet, depuis quelques années, les maires des petites communes n’hésitent pas à monter au créneau pour exprimer leur mal-être au sein de structures intercommunales qui ont été renforcées par les lois Notre et Maptam. L’organisation même de ces nouvelles coopérations intercommunales empêcherait la prise en compte des demandes des maires des petites communes et créerait de ce fait un déficit démocratique. Une impression de dessaisissement à inscrire dans le champ de la crise sociale multiforme que traverse le pays.
La variété des outils
Pour en savoir plus, France urbaine et l’AdCF ont demandé à cinq élèves administrateurs territoriaux de l’Institut national des études territoriales (Inet) — Dorine Parravano, Camille Le Bras, Gaël Astier, Xavier Leibar, Elisabeth Voisin — de travailler sur des territoires où la coopération intercommunale semble plus avancée. Cette étude, intitulée « Intercommunalités : gouvernance, proximité, efficacité » repose sur une enquête de terrain auprès des élus et techniciens d’une quinzaine de territoires urbains.
Comment ce lien urbain-rural s’organise- t-il au quotidien dans les intercommunalités ?
Elle met en relief la variété des outils mis en œuvre par ces intercommunalités pour associer leurs communes membres aux décisions bien au-delà des seules instances prévues par la loi. Elle analyse également les modes de mise en œuvre (territorialisation, mutualisation, contractualisation) qui permettent aux intercommunalités et à leurs communes de combiner au mieux efficacité et proximité dans des territoires souvent denses ou étendus.
Lire aussi : Sortir de sa zone de confort : une exigence pour la ruralité
50 % des communes dans les agglos urbaines sont… rurales !
France urbaine est la première institution représentative du monde urbain. Elle rassemble les grandes villes, les grandes agglos, les communautés urbaines et les métropoles, soit un plus de la moitié de la population française. Mais ce « monde urbain » ne l’est pas tout à fait puisque 50 % des communes appartenant aux intercommunalités membres de France urbaine sont considérées comme rurales par l’Insee. Comment ce lien urbain-rural s’organise-t-il au quotidien dans les intercommunalités ? C’est sur ce vaste champ que cinq élèves administrateurs ont travaillé.
« Dans chacune de ces structures, le président et les vice-présidents coconstruisent les actions sur le territoire »
« À l’heure où la loi Engagement et proximité est discutée au Parlement, où les municipales approchent, il nous est apparu intéressant de savoir comment les métropoles et agglomérations urbaines, plus anciennes, travaillaient en interne cette dualité », assure Ludovic Gousset, directeur développement des territoires et cohésion sociale à France urbaine.
« Des instances existent pour conforter ce lien, le bureau de la métropole, la conférence des maires et le conseil communautaire. De ce fait, dans chacune de ces structures, le président et les vice-présidents coconstruisent les actions sur le territoire et la conférence des maires favorise les compromis. Sur le renforcement de la proximité, les DGS se rencontrent régulièrement », affirme Dorine Parravano. Un pacte de gouvernance permet, en bonne intelligence, d’articuler les trois instances entre elles et d’éviter que certaines communes se sentent plus ostracisées que d’autres.
« Le maire est toujours respecté »
« Le principal enseignement de cette étude, finalement, c’est que, contrairement à ce que l’on pourrait croire, le maire est toujours respecté. Autre aspect, la relation de proximité reste incontournable et les grosses intercommunalités ont tendance à privilégier ce lien en organisant les territoires autour de pôles de proximité », assure Olivier Landel, délégué général de France Urbaine. Même son de cloche du côté de Nicolas Portier, délégué général à l’AdCF : « Les territoires ont mis en place des coopérations à la carte. Cette étude va nous permettre de mieux accompagner les élus, notamment ceux qui seront désignés en mars prochain ».
Une territorialisation des politiques cousue main
Une récente enquête de l’AdCF montre que 20 % des métropoles et communautés urbaines ont mis en place la territorialisation de leurs actions publiques. « Sur les 15 territoires que nous avons examinés, tous sont dans cette dynamique de territorialisation », assure Gaël Astier. « Cela passe par la création de secteurs infra-communautaires, ou d’une forme de décentralisation des compétences. Certains services peuvent être installés ailleurs que dans la ville-centre.
À l’évidence, la territorialisation remet de la proximité et relégitime le positionnement du maire
Puis la mutualisation de certains d’entre eux renforce l’identité commune. Cette adaptation politique se fait d’autant plus facilement que les maires ont les moyens de mener des actions différenciées sur leur territoire. À l’évidence, la territorialisation remet de la proximité et relégitime le positionnement du maire », poursuit-il.
L’élève administrateur cite le cas de la communauté urbaine du Creusot-Montceau (34 communes, 2 villes-centres) où le territoire a été découpé en six secteurs gérés par un DGS. « Les maires sont réunis par secteur autour de la programmation voirie, par exemple, et leurs attentes sont prises en compte ».
Lire aussi : Communes-intercos : le difficile exercice du partage des compétences
La mutualisation, accélératrice de solidarité
De son côté, Xavier Leibar s’est plus particulièrement penché sur « l’accélération du phénomène de mutualisation ». Dans les territoires où la coopération politique est suffisamment forte, la mutualisation renforce naturellement cette identité territoriale, comme dans le Grand Nancy où les systèmes d’information sont mutualisés.
Dans les territoires où la coopération politique est suffisamment forte, la mutualisation renforce l’identité territoriale
« Sur le droit des sols, la mutualisation est aussi un moyen pour les petites communes de faire des économies financières et de bénéficier d’une expertise venue de fonctionnaires territoriaux de plus grandes collectivités. C’est une solidarité active qui permet aux communes rurales de profiter des bienfaits de l’intercommunalité ». Une étude assez éclairante donc sur des collectivités en avance dans la coopération intercommunale. À ceux qui sont à la traîne de s’en inspirer pour créer l’indispensable climat de confiance qui forme un prérequis indispensable à la réussite des territoires.