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Remobilisation, confiance en soi, acquisition de nouvelles compétences… pour accompagner les agents en reconversion, la ville de Cannes mise depuis 2016 sur un parcours individualisé élaboré en collaboration avec le CNFPT.
Chaque année ou presque, naît une petite « promo » d’agents en reconversion. « Presque, car nous estimons qu’ils doivent être au minimum huit pour que cela fonctionne » explique Thierry Migoule, DGS de la ville de Cannes. Depuis le lancement de cette formule en 2016, seule l’année 2018 n’a pas réuni assez d’agents pour lancer le programme. La première année a compté quatorze participants qui, pour raisons médicales, se voyaient contraints de trouver un nouvel horizon professionnel.
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Une approche pragmatique
« Lorsqu’un agent entre en période de reclassement, détaille Sylvia Mialhe, responsable du service formation, nous commençons par un entretien individuel qui permet de définir les compétences de l’agent dans le cadre de son parcours. Puis l’agent intègre un atelier de remobilisation de trois jours avec le CNFPT. »
Au cours de cet atelier, un second entretien est organisé pour cerner le contexte et les postes que l’agent pourrait envisager. C’est généralement un moment d’échange où la personne est confrontée au principe de réalité : quels postes peuvent vraiment correspondre à ses conditions physiques, à ses compétences acquises ou à acquérir ? « Durant ces trois jours, les agents parlent de leur parcours professionnel, des compétences qu’ils ont acquises, ils découvrent généralement qu’ils en ont bien plus que ce qu’ils croient. Cette étape les place dans une autre dynamique et le fait d’être en groupe, de pouvoir échanger sur les situations des uns et des autres leur permet de se sentir soutenus.
À la fin de l’atelier, la personne est sortie de sa période de deuil, elle peut entamer son nouveau parcours de formation
À la fin de l’atelier, la personne est sortie de sa période de deuil, elle peut entamer son nouveau parcours de formation » estime Sylvia Mialhe.
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Miser sur une cohésion d’équipe
Commence alors un parcours individualisé de 23 jours échelonnés sur trois à quatre mois, et pour lequel l’agent bénéficie d’un suivi par le service mobilité interne et par le service formation. À l’issue, ce dernier sera prêt à intégrer un nouveau poste. Pour autant, l’accompagnement ne cessera pas : des points réguliers seront organisés pour veiller à sa bonne intégration, et pour compléter sa formation si cela s’avérait nécessaire.
Les agents prennent conscience que la mairie les accompagne, cela leur donne un plus grand sentiment d’appartenance à la collectivité
« Par cet engagement de notre part, les agents prennent conscience que la mairie les accompagne, cela leur donne un plus grand sentiment d’appartenance à la collectivité, et cela a pour effet de les responsabiliser dans le cadre de leur parcours » détaille Thierry Migoule.
Suivre ces étapes de reconversion en groupe est un autre point fort, selon le DGS. « Cette petite équipe partage ses difficultés, elle se soude et s’entraide, cela crée une cohésion qui ne s’arrête pas à la fin du parcours. Les agents continuent à se donner des nouvelles par la suite. »
À SAVOIR
À Cannes, les agents les plus touchés par l’usure au travail sont généralement…
• agents d’entretien
• en petite enfance
• dans l’éducation
• agents de salubrité
• auxiliaires de puériculture
• aides cuisiniers
Leurs principales affectations sont…
• agents d’accueil dans les musées, conservatoires, médiathèques, pôle d’art moderne
• agents administratifs
• secrétaires
• standardistes
• agents d’état civil
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Détecter les signaux faibles
Les services concernés tâchent maintenant d’améliorer l’anticipation : des réunions régulières sont organisées entre la médecine professionnelle, une psychologue du service d’hygiène et les ressources humaines. Ensemble, ils tâchent de détecter les signaux faibles de personnes en difficulté sur leur poste. « À chaque cas identifié, nous procédons à une rencontre avec les responsables hiérarchiques de départ et d’accueil de l’agent pour leur présenter le parcours. »
Selon Thierry Migoule, « les intégrer dans le processus leur permet de mieux accepter les difficultés qui se présentent ». Car l’objectif, aujourd’hui, est d’anticiper encore plus afin que les agents parviennent à rester à leur poste avec un aménagement. Depuis 2016, sur les trente personnes qui ont suivi ce parcours de mobilité interne, vingt-quatre agents ont pu intégrer un nouveau poste, quatre ont bénéficié d’un aménagement de leur poste actuel et pour deux, il n’a pas été possible de trouver de solution.
TÉMOIGNAGE
À Fontenay-sous-Bois, des postes relais identifiés
« Nous avons identifié dans la commune 35 postes relais, que les agents en reconversion peuvent tester pour une durée allant de six mois à deux ans maximum. Ce ne sont pas des postes en sureffectif, les agents intègrent un vrai poste et de véritables fonctions. Ils peuvent devenir agent d’accueil, gestionnaire, agent de billetterie, agent de patrimoine, appariteur, assistant documentaliste, comptable, gestionnaire, secrétaire, colleur d’affiches, employé de station-service au garage municipal, jardinier, peintre, magasinier, technicien cadastre, gardien ou bien faire de la saisie de commande.
Lorsqu’un agent entame une démarche de reclassement, nous organisons un premier entretien pour lui expliquer la procédure, puis un second entretien pour examiner avec lui les postes que nous pouvons lui proposer. Nous explorons autant les postes vacants que les postes relais, pour identifier ce qui pourrait l’intéresser mais aussi ce qui lui convient en termes médicaux. Notre objectif est de lui offrir très rapidement un autre poste pour éviter que ce dernier ne se trouve sans droits : l’anticipation est capitale.
Une fois un poste choisi, nous comparons les compétences requises et celles de l’agent, et nous lui proposons des formations complémentaires si cela s’avère nécessaire. Cette prise de fonction permet d’acquérir à la fois une expérience sur le poste qu’il vise à terme, et les compétences grâce à la formation. L’instauration des postes-relais nous a également demandé de travailler avec les supérieurs hiérarchiques de ces postes. Lorsque nous les avons identifiés, les chefs avaient la possibilité de proposer un autre poste s’ils estimaient ce choix plus judicieux. Puis il nous a fallu les convaincre de la nécessité de faire tourner les agents, et d’accepter de s’en séparer une fois formés. C’est une question de solidarité.
Après cette phase, l’agent peut plus facilement se porter candidat. Comme la durée maximum est de deux ans sur ces postes-relais, il devient prioritaire dès qu’un poste s’ouvre, pour que sa motivation reste intacte et pour que sa situation administrative soit aussi réglée dans des délais raisonnables. D’autres collectivités sont venues nous rencontrer pour déployer le même système chez elles. Ivry vient notamment de s’y mettre. »
Myriam Khemissi, DRH