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Dans leur forme moderne, les services de communication sont héritiers des organes de propagande de la Grande guerre. Âgés d’un peu plus d’un siècle, ils sont donc encore jeunes. Pourtant, ils ont subi des impacts technologiques considérables. Les outils sont nombreux et les capacités d’action vastes, démultipliées par la révolution numérique. Leur efficacité dépend de leur synergie, que seule une organisation à la fois agile et robuste peut garantir.
Il faut se rendre à l’évidence : la communication a foncièrement changé de nature depuis dix ans. Les communicants ne sont plus les principaux producteurs de messages, les deux tiers des contenus venant aujourd’hui de tiers. La communication est devenue communautaire, conversationnelle, interactions.
Les communicants ne sont plus les principaux producteurs de messages : deux tiers des contenus viennent aujourd’hui de tiers.
Elle s’est enrichie de nouveaux métiers, évoluant plus que jamais vers un service de la relation, en phase avec les aspirations et les besoins des publics, considérant ceux-ci plus seulement comme des destinataires ou prescripteurs, mais comme des co-producteurs.
Finie l’organisation classique
Pour faire face à ces nouveaux défis, le service communication doit intégrer dans son fonctionnement réactivité, fluidité et autonomie. Finie l’organisation classique sous forme de pôles métiers. L’association Communication et Entreprise a identifié plusieurs modèles :
- la newsroom. Le service s’articule en deux pôles, l’un chargé des contenus (conception et rédaction), l’autre gérant les canaux de diffusion. Cette organisation, à l’image d’une agence de presse, a pour avantage d’intégrer le numérique de façon transversale. Elle permet une grande réactivité tout en garantissant la cohérence des messages. Un modèle innovant qu’on retrouve peu dans les collectivités ;
Grégory Bozec, Directeur de la communication de Massy : « Se (re)structurer pour être un vecteur de création de valeurs »
« Le service communication du XXIe siècle devra s’employer à rester ce trait d’union entre les politiques publiques menées sur un territoire et les acteurs (citoyens, associations…) de ce même territoire. Il devra se (re)structurer intrinsèquement pour être un vecteur de création de valeurs de son périmètre d’action et bien au-delà. L’avènement et la généralisation des pratiques liées au marketing territorial vont amener les collectivités à se doter de véritables outils innovants : plateformes collaboratives, médias du digital, réseaux sociaux, au service de véritables stratégies de marque. Faisons le pari d’une communication responsable, éthique, sociale et partagée pour les années à venir. »
- la logique de guichets. Le service est organisé en miroir de la structure de la collectivité, avec des chargés de communication pour chaque département. Gage d’une excellente connaissance du secteur et d’une grande réactivité, ce modèle pose les problèmes de la transversalité (risque de perdre la vision globale de la stratégie de communication) et de la limitation du service à un rôle de prestataire ;
- le calage sur les publics. D’une manière générale, ce modèle est rare et semble peu adapté pour les collectivités dont les cibles sont à la fois nombreuses et pas toujours segmentables.
Xavier de Fouchécour, Directeur de l’agence Beaurepaire : « Le service d’intermédiation entre l’habitant et la puissance publique »
« Le transfert de l’attention des habitants vers les supports digitaux conduit les services de communication à se réorganiser en profondeur. Le directeur de la communication n’est plus le maître du discours. Il est celui qui va animer la production et faciliter la diffusion des contenus et la modération des conversations qu’ils occasionnent. Au sommet d’un organigramme ayant tendance à s’aplatir, il s’entourera désormais de nouvelles compétences, lesquelles ne correspondent pas encore à des titres bien établis : content manager, creativ technologist, graphiste print/web avec de bonnes notions d’UX… Ainsi, la communication n’a plus pour seul objet d’être au service de, elle devient le service d’intermédiation entre l’habitant et la puissance publique.
L’hybride à quatre têtes
Une solution hybride, mix des trois organisations précédentes, est sans doute la recette idéale, sous condition d’être adaptée à la stratégie de la collectivité. Un pôle plurimédias, réunissant sous l’autorité d’un rédac’ chef à la fois les contenus écrits et médias (journaux, réseaux sociaux, sites et applications), garantit une cohérence forte entre les messages, et combine numérique et print, information chaude et froide. Il a vocation à fonctionner en binôme avec un pôle image, qui regroupe les fonctions de création et conception print, 3D, signalétique, design web, photo et vidéo.
Un troisième pôle est dédié aux relations habitants, organisant leur participation, leur donnant la parole, favorisant l’émergence d’initiatives, testant les campagnes.
Un troisième pôle est dédié aux relations habitants, organisant leur participation, leur donnant la parole, favorisant l’émergence d’initiatives, testant les campagnes. Enfin, un pôle stratégie, raisonnant par cibles, complète le dispositif et donne la vision stratégique.
Conditions ultimes pour que l’organisation fonctionne : une fonction de veille permanente et un mode de travail collaboratif sur une plateforme numérique dédiée.
Samia Khenniche, Enseignante chercheuse en management public : « Identifier les actions ou projets à éclairer »
« Un service communication est à l’interface de différents acteurs : élus, administration, médias, usagers. Sa capacité à interagir, à créer des relations, en interne comme en externe, est donc primordiale. L’objectif est d’identifier les actions ou projets à éclairer, qui interpellent ou fassent écho aux usagers. Dans cette optique, développer la transversalité, la concertation avec les différents services, est essentiel ; notamment pour détecter les actions parfois occultées par les projets phares de la collectivité. Un autre levier est celui des compétences numériques : avec la progression des moyens de communication numérique, intégrer ces savoir-faire permet de gagner en autonomie et réactivité. »