Sophie Pantel est présidente PS du Conseil départemental de la Lozère et nouvelle présidente de l'Anil
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Présidente du conseil départemental de la Lozère, Sophie Pantel assure depuis le 9 décembre 2021 la présidence de l’Agence nationale pour l’information sur le logement, l’Anil. Le logement est un bon catalyseur des difficultés rencontrées par les territoires ruraux pour se développer tout en gardant leur authenticité. Un exercice de fine broderie qui réclame une planification bien en amont.
Pourquoi avoir pris la présidence de l’Anil ?
Je suis d’assez près ces questions-là et je suppose donc que mon nom a dû arriver aux bonnes oreilles. Je m’inscris dans la continuité du travail réalisé depuis des années par Nathalie Sarrabezolles, à laquelle je succède. J’ai quelques objectifs assez simples mais qui demandent une certaine application dans leur réalisation : donner plus de visibilité au réseau des Adil, qui sont nos déclinaisons départementales sur le terrain, sachant que ces agences disposent d’une véritable expertise et que le grand public, voire les élus, ne sont pas toujours au courant de ce qu’ils peuvent y trouver. Au cours de l’année, j’entends réunir l’ensemble des collaborateurs pour mener à bien cette réflexion sur l’efficacité de notre ancrage dans les territoires. Avec en point d’orgue un colloque que nous organiserons dans le nord du pays.
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Quelle est la puissance de frappe de l’Anil sur le terrain ?
85 départements disposent d’une Adil. Nous avons donc une marge de progression pour conforter cet ancrage territorial. Les agences sont présentes à travers 120 centres d’information sur l’habitat et assurent 1 200 permanences au plus près des habitants, dans les mairies ou des centres d’accueil. 25 Adil accueillent un espace Faire (ndlr, service guidant pour l’amélioration du confort du logement). Nos 700 collaborateurs ont dispensé 875 000 consultations en 2020. Les questions tournent essentiellement autour de la location et de la rénovation énergétique.
« Cette anticipation du ZAN est catastrophique parce que l’on passe d’un extrême à l’autre »
On pourrait croire que la problématique du logement concerne plus directement des départements urbains que ruraux…
Elle traverse l’ensemble du pays, avec des spécificités d’un territoire à l’autre. En Lozère, les prix de l’immobilier flambent, notamment autour du parc des Cévennes, ce qui est problématique pour garder la population sur place et pour en conquérir une nouvelle. Parce qu’il ne vous a pas échappé que la crise a renforcé l’attractivité de départements comme le nôtre. Mais nous ne disposons pas suffisamment de réserves foncières pour construire un habitat adapté à ces nouveaux profils sociologiques. La préfecture applique avec beaucoup de zèle le zéro artificialisation nette (ZAN) alors que nous avons besoin de renouveler notre population et 400 emplois ne sont pas pourvus dans notre département ! Toutes les communes qui engagent des révisions de documents d’urbanisme voient ces derniers retoqués par la préfecture ! Cette anticipation du ZAN est catastrophique parce que l’on passe d’un extrême à l’autre. Je suis présidente d’un département rural, j’accompagne le développement du logement social, du logement intermédiaire. Il faut me donner les outils pour que je puisse mener à bien cette mission. Sinon, on risque de nous placer sous cloche. C’est une difficulté récurrente des textes nationaux de ne jamais prendre en compte les spécificités territoriales. Une règle urbanistique peut être bonne pour Mende et mauvaise pour Paris.
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Comment envisagez-vous le développement des territoires ruraux, qui séduisent de plus en plus de télétravailleurs ? Croyez-vous-en la pérennité du modèle ?
Certains parlent d’hyper-ruralité ! Je préfère associer ruralité à montagne, ça parle mieux dans les dispositifs potentiels de financement, notamment européens. Les gens acceptent l’idée d’être moins bien payés, de ne plus être exposés à la pollution ou l’insécurité, ils veulent savoir ce qu’ils mangent. Bref, le temps est porteur pour nous. Je le dis depuis longtemps, il y a une lame de fond, nous avons inversé la tendance. Nous ne perdons plus d’habitants. Nous avons mis en place un site, Lozère nouvelle vie, pour accompagner les gens désireux de s’installer chez nous. Nous veillons à créer les conditions d’un tourisme durable. Mais le sujet le plus crucial, c’est l’eau…
« Nous serons confrontés à des épisodes de sécheresse de plus en plus sévères. Certains de nos maires livrent des bouteilles d’eau minérale à leurs habitants l’été »
Qu’est-ce à dire ?
Pour préparer les vingt prochaines années, nous devons préserver les ressources en eau de notre département. Le sujet est technique mais absolument capital. Nos terres ne gardent pas l’eau. C’est ainsi. Nous serons confrontés à des épisodes de sécheresse de plus en plus sévères. Certains de nos maires livrent des bouteilles d’eau minérale à leurs habitants l’été. Nous devons impérativement accélérer sur les énergies renouvelables, créer une société, je n’en connais pas encore la forme juridique, pour réserver du foncier, déployer tout un arsenal de services à la personne. Action cœur de ville ou l’opération Petites villes de demain vont dans la bonne direction mais ce sont souvent des réaffectations de crédits. Le département a mis en place des contrats territoriaux. La région en fait de même de son côté. Il y a comme toujours une tendance à l’éparpillement. La France est championne du monde de la multiplication des contrats. Or, je suis convaincue que l’on peut faire plus simple pour plus d’efficacité.