Suspension des agents non-vaccinés : le cadre légal précisé par le Conseil d’État

Yves Broussolle

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Suspension des agents non-vaccinés : le cadre légal précisé par le Conseil d’État

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Dans un arrêt du 11 mai 2022 , le Conseil d’État a apporté des précisions sur la légalité d’une mesure de suspension d’un agent public non vacciné qui était en congé de maladie. Décryptage.

Par une décision du 13 septembre 2021, le directeur général d’un centre hospitalier a suspendu une infirmière titulaire jusqu'à ce qu'elle satisfasse à l'obligation de vaccination contre la covid-19 prévue par l'article 12 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire. Pour rappel, l’ensemble des agents travaillant dans des établissements de santé se sont vus imposer une obligation de vaccination contre cette maladie.

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Arrêt maladie et légalité de la décision


L’agent qui fait l’objet d’une interdiction d’exercer peut utiliser, avec l’accord de son employeur, des jours de congés payés. À défaut, il est suspendu de ses fonctions ou de son contrat de travail. Cette suspension s’accompagne de l’interruption du versement de la rémunération. Le centre hospitalier s’est pourvu en cassation devant le Conseil d’État (CE) contre l'ordonnance du 15 novembre 2021 par laquelle le juge des référés du TA d’Orléans a ordonné la suspension de l'exécution de cette décision.

Pour le CE, le moyen tiré de ce que la décision prononçant la suspension d’un agent a pris effet alors qu’il était en congé maladie est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l’entrée en vigueur de cette décision, en tant qu’elle précède la fin du congé de maladie.

Privé de rémunération, l’agent subit un préjudice grave

En outre, la décision litigieuse qui a pour effet de priver l’agent de toute rémunération, préjudice de manière grave et immédiate à sa situation financière. Par suite, la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie tant que l’agent est en congé de maladie.

| Lire aussi :  La justice administrative commence à trancher sur les suspensions pour refus de vaccination  |


Suspension du traitement corrélé à l’arrêt maladie

Quoi qu’il en soit, précise le Conseil d’État, l’autorité administrative peut légalement prendre une mesure de suspension à l'égard d'un agent qui ne satisfait pas à l'obligation vaccinale contre la covid-19 alors que cet agent est déjà en congé de maladie.
Toutefois, cette mesure et la suspension de traitement qui lui est associée ne peuvent entrer en vigueur qu'à compter de la date à laquelle prend fin le congé de maladie de l'agent en question.

On rappellera que la décision de suspension n’est pas une sanction disciplinaire


On rappellera que la décision de suspension n’est pas une sanction disciplinaire et ne repose pas sur les fondements de la suspension de l’article 30 du statut général. Il s’agit d’une mesure prise dans l’intérêt du service pour des raisons d'ordre public afin de protéger la santé des personnes.


Pendant la période de son arrêt de travail, l’agent public doit pouvoir se consacrer au rétablissement de sa santé et n’est pas tenu de répondre aux sollicitations de son employeur. Il doit seulement transmettre un avis d’interruption de travail, dans le délai de quarante-huit heures suivant son établissement. En revanche, l’autorité territoriale ne peut lui demander de fournir des justificatifs relatifs à son statut vaccinal avant le terme de son congé de maladie.


Quelle urgence à suspendre ?

De son côté, le centre hospitalier soutenait que le retour de l'intéressée était de nature à porter atteinte à l'intérêt général qui s'attache à la protection de la santé des personnes hospitalisées. Mais pour le CE, cette circonstance n'est « compte tenu de ce que le congé de maladie de l’agent a pour effet de l'éloigner de son lieu de travail, pas de nature à caractériser la nécessité d'exécuter immédiatement la décision contestée tant que l'intéressée est en congé de maladie ».
Dès lors, le CE a suspendu l'exécution de la décision attaquée jusqu'au terme du congé de maladie de l’intéressée ou de tout autre congé qui lui aurait été immédiatement consécutif.


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