Pour la première fois depuis l'élection de François Hollande, les 5,2 millions de fonctionnaires du pays sont appelés par trois syndicats à cesser le travail ce jour afin de faire part au gouvernement de leur impatience, notamment en matière de pouvoir d'achat.
La CGT, FSU et Solidaires, qui totalisent 40% des voix chez les agents, ont déposé des préavis de grève pour les trois versants de la Fonction publique (Etat, Territoriale et Hospitalière). Ils entendent signifier qu'ils attendent des gestes concrets en matière salariale, la dernière augmentation générale remontant à 2010, mais défendent aussi des revendications concernant l'emploi ou la journée de carence (non indemnisée) en cas d'arrêt maladie.
Quelque 120 rassemblements et manifestations sont prévus dans l'ensemble de la France, dont une manifestation à 14 heures à Paris à partir de Port-Royal.
"Les agents attendent un signe de changement du gouvernement", a expliqué à l'AFP Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU, pour qui "la fonction publique se sent oubliée".
Depuis l'arrivée de la gauche au pouvoir il n'y a "aucun signe tangible, concret, qui nous permette de penser que les choses vont s'améliorer", estime pour sa part Denis Turbet-Delof (Solidaires). "Tout le monde souhaitait le changement (...). On a attendu longtemps. Maintenant, il faudrait peut-être penser un peu aux agents".
La dernière mobilisation similaire remonte à octobre 2011, pendant "les derniers mois de l'ère Sarkozy", rappelle Jean-Marc Canon, responsable du premier syndicat de fonctionnaires, la CGT.
"Cela ne peut pas durer comme ça"
Avec ce mouvement, les syndicats espèrent peser sur une réunion consacrée aux carrières et rémunérations prévue le 7 février avec la ministre Marylise Lebranchu, qui doit permettre d'entrer dans le vif du sujet après la phase de bilan.
Pour M. Canon, la situation en matière salariale est "absolument catastrophique" et exige des "mesures urgentes". "Cela ne peut pas durer comme ça", affirme-t-il.
"Même si tout le monde connaît très bien le contexte économique, tout le monde estime que ce gouvernement doit être en capacité de donner un signe", estime Bernadette Groison, pour qui "c'est aussi la reconnaissance de la fonction publique" qui est en jeu.
Les syndicats réclament une revalorisation du point d'indice qui sert de base au calcul des salaires et n'a pas bougé depuis 2010.
Mais la marge de manoeuvre budgétaire de Mme Lebranchu est pratiquement nulle, le gouvernement prévoyant de maintenir quasiment stable la masse salariale de l'Etat d'ici 2015 -- 80,6 milliards d'euros en 2013 --. Or une hausse de 1% du point d'indice augmente de 800 millions d'euros cette masse salariale et de 1,8 milliard celle des administrations publiques, selon la Cour des comptes.
Pour illustrer la nécessité d'une revalorisation, M. Canon souligne que 945.000 agents sont payés au Smic ou juste au-dessus, la dernière augmentation du salaire minimum ayant obligé le gouvernement à revaloriser leur salaire.
Il n'exclut pas une "mobilisation beaucoup plus large si les choses restent en l'état", assurant que "les mots d'ordre mis en avant sont très largement partagés par la plupart des syndicats de la Fonction publique", certains ayant choisi d'attendre la réunion du 7 février pour "voir ce qu'il y a dans l'escarcelle de la ministre".
Les syndicats mettent également en avant la question de l'emploi, inquiets des suppressions de postes qui doivent permettre des créations dans les ministères prioritaires (Education, Justice, Police).
Ils réclament également l'abrogation de la journée de carence instaurée par le gouvernement Fillon, faisant valoir qu'à l'époque le parti socialiste l'avait vigoureusement dénoncée.