Une pointe d’humour dans votre management

Fabrice Anguenot

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De plus en plus étudié en management, l’humour devient un levier pour désamorcer les crises, prévenir les conflits, fédérer les équipes et contrecarrer la morosité ambiante au sein des services. Il s’agit d’une forme de communication à ne pas mésestimer, lorsque l’on a en charge le management d’une équipe, car elle est susceptible d’engendrer un climat positif, et d’être un formidable levier pour conduire le changement.
L’humour dans le travail est devenu un enjeu, aux États-Unis, à partir des années soixante-dix. Ce n’était pas sans lien, à cette même époque, avec la montée des discours autour du stress dans les entreprises. La tendance était au management non directif, tourné vers la convivialité et l’empathie. En France, ce type de pratique arrive dans les années quatre-vingt-dix, et comme outre-Atlantique, elle est corrélée avec la montée des préoccupations sur les risques psychosociaux. Comme le faisait remarquer récemment Marc Loriol, « C’est aussi la période où l’on constate une augmentation de l’agressivité verbale, voire physique des clients. Des cabinets de conseil essaient de mieux former à désamorcer les conflits en proposant des réactions standardisées par l’humour. C’est le cas dans les télécoms, où l’on remonte « le taux de pannes acceptable », en pensant que le management va s’en sortir avec du relationnel et de l’humour. Les écoles de commerce se mettent à l’enseigner. Comme au temps de l’académie McDonald’s où l’on donnait déjà des cours d’humour dans les années soixante-dix » ((Article pour Libération, 12/09/2013. Entretien avec Marc Loriol, sociologue du CNRS, Le rire spontané au travail cède la place à un rire « technique de management ».)).
Mettez à plat les contentieux pour résoudre les litiges non digérés entre collègues
Ainsi donc, l’association du travail et de l’humour, voire du rire, n’est pas contradictoire avec l’idée d’efficacité au bureau, le bien-être au travail favorisant bien davantage la collaboration des agents et la satisfaction de ces derniers de venir travailler, qu’une ambiance pourrie. Vu sous cet angle, l’humour est une chose sérieuse, puisque de bonnes relations de travail profitent à la production. Cependant le rire sur le lieu de travail reste encore mal perçu, et malgré le désir des agents d’encourager cette pratique, ce sont souvent les mêmes qui se l’interdisent, par peur des reproches.

Créer des espaces de décompression

L’humour est un style de management. Il s’agit d’un « exercice » qui, lorsqu’il est bien mené par le responsable de service ou le manager, crée des espaces de décompression favorables aux agents, et ceci particulièrement en période difficile.Cependant, c’est un outil à manier avec précaution. Il doit respecter certaines règles, comme rester fédérateur. En effet, faire de l’humour au détriment de la personne absente (malade, en congés…) ou du collaborateur déjà à l’écart, peut provoquer un effet pervers en renforçant les dissensions déjà existantes au sein de l’équipe. L’humour ne doit pas être agressif et surtout ne doit pas être permanent, afin de ne pas saturer le discours sous une forme de lourdeur.Autrement dit, utilisez-le avec parcimonie. Pour le pratiquer, le manager doit être à l’aise avec l’exercice. Un responsable connu pour son trop grand sérieux, voire pour son austérité, et qui se lancerait dans ce type d’exercice risquerait d’être mal compris. Mais n’ayez non plus pas peur du « bide », une mauvaise blague n’est pas la fin du monde ! Retournez donc la situation à votre avantage, et pratiquez l’auto-dérision.Sachez qu’on ne peut pas rire de tout et surtout pas avec tout le monde. Il faut contextualiser son humour en fonction de la personne que l’on a en face de soi. On peut être plus direct avec un proche collègue qu’avec un collaborateur que l’on connaît moins. Ensuite, il faut tenter d’apprécier son propre humour, se demander si l’on sait l’utiliser à bon escient.Enfin, dernier point, il faut rester ouvert face aux autres formes de plaisanteries, être curieux, apprendre à décaler certaines situations pour faire sourire.En résumé, non seulement le rire est bon pour la santé, mais en plus il crée des relations de confiance entre les personnes, de la cohésion, et donc de l’efficacité. Attention toutefois à ne pas le pratiquer avec excès, au risque de voir l’environnement de travail se transformer en scènes de sketchs…
 L’humour est une chose sérieuse, puisque de bonnes relations de travail profitent à la production

Percevoir les symptômes de la morosité

Comme l’humour, la morosité, est un phénomène de groupe. Et, dans la vie classique d’une équipe, les grands changements sont souvent précédés de périodes de morosité. Cela fait partie intégrante du cycle de vie d’une équipe. En qualité de manager, il est important d’arriver à identifier ces moments, afin de ne pas laisser la morosité s’installer durablement. C’est par une bonne connaissance de son équipe, comme des agents qui la composent, que le manager pourra ressentir ces moments de flottements, et actionner les leviers nécessaires à une dynamique plus positive.Concrètement, la morosité conduit l’équipe à un désintérêt progressif, les agents vont se laisser polluer par des bruits de couloir et des rumeurs infondées, ou à se plaindre, voire même à se disputer ! Il s’agit là des signaux d’alertes pour le manager, ces derniers doivent l’encourager à agir, pour réguler au plus vite les relations humaines au sein de son service. Pour y remédier, il vous faudra verbaliser les non-dits afin de lever les confusions et autres interprétations.En clarifiant la situation, vous montrez que vous la maîtrisez, vous objectivez et relativisez les rumeurs, et par là même vous asseyez votre leadership en rassurant l’équipe par un dialogue franc. Mettez à plat les contentieux pour résoudre les litiges non digérés entre collègues.Ne pas tomber cependant dans un excès de confiance, en s’imaginant que le manager est extérieur à la vie de l’équipe. Il est souvent lui aussi pris dans le système de morosité, et ne peut agir seul de l’intérieur. Alors, le recours à un appui extérieur (coaching, audit, formation…) est parfois salvateur, pour remonter des symptômes de morosité, jusqu’aux dysfonctionnements générateurs de problèmes, et ainsi regalvaniser son équipe…

Quand l’acédie gagne le groupe Il n’est pas rare de voir une équipe démobilisée à la suite d’un échec ou bien d’une réussite, qui a suscité beaucoup d’espoir et demandé beaucoup d’engagement de la part des collaborateurs. L’euphorie qui tenait l’équipe durant le projet retombe, cédant le pas à une forme de morosité. Suite à des changements profonds (remaniement d’équipe, changement de direction… etc.), une morosité peut s’installer. Les agents vont avoir comme réaction de résister, parfois même de manière inconsciente, simplement parce qu’ils ne savent pas faire face à ces bouleversements, si bien que « l’acédie » gagne le groupe. Autre risque, la routine quotidienne, enracine quelquefois les collaborateurs dans une forme de confort. L’absence de projet, de dynamisation de groupe, d’émulation, que le manager pourrait apporter peut tout à fait conduire l’équipe vers la morosité.

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